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MADEMOISELLE DE GOURNAY.

Pierre, étant douze mois méchant,
À Pâques est saint comme un ange :
Dont le peuple, qui prend le change,
Homme de bien le va prêchant.
Pierre, la vie est condammée
Par le crime d’un seul moment ;
Et tu te crois juste une année,
Si tu t’es un jour seulement.

Colin, qui n’a vu que son livre,
Veut faire le drapeur[1] de cour[2] ;
Or, Colin, pour le faire court,
La cervelle d’un sot t’enivre.
Un savant qui fait l’impudent
N’est pas certes, comme il te semble,
Courtisan et savant ensemble,
Mais il est pédant et pédant.


Mais la plupart paraîtront trop inoffensives. Le malheur est que souvent elles n’ont pas plus de naïveté que de piquant, et qu’elles sont, en d’autres termes, ou vulgaires ou prétentieuses. Là en effet se montre très-fréquemment l’affectation du bel esprit, accréditée dans la cour de Louis XIII par le cavalier Marin. Rien de plus frivole que quelques-uns des sujets : il n’est pas jusqu’au « petit chien de la reine régente » qui n’ait son tribut poétique. Beaucoup de pièces sont d’ailleurs de simples distiques ou quatrains. On y trouve, en outre, des compliments adressés par mademoiselle de Gournay à des personnages d’un rang élevé, et ce n’est

  1. Il ne nous reste que le verbe draper : railler quelqu’un, en dire du mal.
  2. Nous avons vu qu’on écrivait alors court.