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MADEMOISELLE DE GOURNAY.

à leur défaut, par l’Académie naissante. Le second chant fut offert en 1626 au maréchal Bassompierre, qu’elle louait « de la beauté de sa personne autant que de son esprit, de sa générosité, de son cœur français, » et dont la grande réputation, disait-elle, avait amené l’usage proverbial, familier aux dames de toute condition, « d’appeler le Bassompierre, entre elles, celui qui primait sur ses compagnons[1]. » Quant au sixième livre, il parut, en 1634, sans dédicace.

La citation suivante, empruntée au premier chant, montre déjà que cette traduction ne manque ni de mouvement ni même d’un certain éclat.


Il chante[2] du soleil les courses opportunes
Et les erreurs sans fin des successives lunes ;
Quelle heureuse industrie a formé les humains,
Qui fit le feu, la pluie et les nuages vains,
Quel dessein forgea l’ourse et l’enfant qui la guide,
D’où naissent les trions, qui rend l’hyade humide,
Pourquoi Phébus, l’hiver, précipitant son cours,
Plonge sitôt en mer le blond fanal des jours,
Et d’où vient qu’un long jour les courtes nuits resserre,
Lorsqu’inspirant l’été ses rais[3] dorent la terre.
La cour des Tyriens bruit d’applaudissement,
Et celle des Troyens la suit allègrement :

  1. On peut juger par le détail suivant de la vogue dont jouissait ce personnage et de sa fatuité. Il nous apprend dans ses Mémoires que, « la veille du jour où il fut mis à la Bastille (février 1631), il brûla six mille lettres d’amour qui lui avaient été écrites par diverses femmes. » Tome III. p. 268 de la collection Petitot.
  2. Il s’agit du joueur de lyre Iopas. Voyez le texte, v. 744-753.
  3. Du latin, radii, rayons.