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MADEMOISELLE DE GOURNAY.

les coups, et ils peuvent moissonner autant de gloire qu’ils se veulent épargner de labeur. » C’était par suite de cette disposition que plusieurs, faisant profession de mépriser les écrits des femmes, refusaient même de les lire, au grand scandale de mademoiselle de Gournay.

Une certaine chaleur de détails ne laisse pas de racheter, dans ces différentes pièces ce que le fond a de frivole ou de commun : cette observation s’applique spécialement au dernier morceau, qu’anime par intervalle le mouvement de la passion. Il en est ainsi d’un autre ouvrage de mademoiselle de Gournay, qui serait plus piquant sans la forme pédantesque dont il est hérissé, sans les citations fréquentes et les raisonnements scolastiques qui le surchargent : c’est l’Égalité des hommes et des femmes. Elle le dédia à la reine Anne d’Autriche, qui était alors, selon le style maniéré de l’auteur, ce dans l’orient de son âge ainsi que de ses vertus, » et à qui elle recommandait, « pour en atteindre heureusement le midi, de se jeter avec ardeur sur l’étude des bons livres, précepteurs de prudence et de mœurs. »

Après s’être amèrement déchaînée contre l’outrecuidance de ceux qui renvoient son sexe à la quenouille, elle établit ses preuves « de la dignité et de la capacité des dames » sur l’autorité de Dieu et des Pères de l’Église, ainsi que des anciens philosophes. Les bons patrons, on peut le voir, ne manqueront pas à sa cause. Elle commence par invoquer le témoignage de Socrate, de Platon et d’Aristote, qui prétendent que les femmes ont, par leurs vertus ou par leurs talents dans les arts,