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MADEMOISELLE DE GOURNAY.

Cette petite pièce est suivie de plusieurs dissertations assez minces, qui traitent successivement des vertus vicieuses, des grimaces mondaines, de l’impertinente amitié, des sottes ou présomptives[1] finesses, du grief des dames. En premier lieu, mademoiselle de Gournay déclare la guerre à cette faible raison, qui nous pipe si facilement, comme l’ont dit Montaigne et Pascal. Elle démontre que le vulgaire, prompt à confondre la vertu et le vice, est déçu à tout moment, en baptisant du nom de vertueuses des actions qui ont le vice pour racine : presque tout ce qui se fait ici-bas n’a-t-il point sa source dans l’amour de la gloire, le désir de la renommée ou tout autre calcul d’intérêt privé ? Avec cette rigueur excessive d’appréciation, elle interroge les mobiles secrets de la conduite humaine, et se plaît à la dépouiller des dehors spécieux et recommandables dont elle se pare faussement. Une humeur un peu chagrine et un peu de malignité se mêlent à cette étude du cœur, d’ailleurs superficielle et rapide. Les Grimaces mondaines sont une espèce de satire dirigée contre ces esprits légers qui jugent et honorent les hommes sur le prestige dont leurs richesses ou leurs dignités les entourent, non d’après leur valeur réelle ; qui, les yeux éblouis par une vaine pompe extérieure, s’arrêtent à la cérémonie et sont incapables de percer jusqu’à l’individu lui-même. L’Impertinente amitié, dont s’occupe ensuite mademoiselle de Gournay, lui

  1. Ce sont des finesses, présumées telles, par lesquelles on croit tromper les autres sans y réussir.