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MADEMOISELLE DE GOURNAY.

Ronsard. — Je lui donne cinquante livres par an, dit le cardinal. — Il y a encore ma mie Piaillon, a ajouta Bois-Robert ; c’est sa chatte. — Je lui donne vingt livres de pension, répondit l’éminentissime. — Mais, monseigneur, elle a chatonné, » dit Bois-Robert. Le cardinal ajouta encore une pistole pour les chatons. » Richelieu, par la suite, ayant voulu augmenter ce total bizarre, on prétend que mademoiselle de Gournay se refusa généreusement à rien recevoir de plus.

D’autres personnages importants de cette époque lui accordèrent une protection moins efficace sans doute, mais qui ne témoignait pas d’une opinion moins favorable. Parmi les hommes de lettres les plus distingués, elle compta de nombreux amis, tels que Balzac, le savant du Puy, Juste Lipse, etc. On raconte qu’à la naissance de l’Académie française, les membres de ce corps illustre ne dédaignèrent pas de se rassembler plusieurs fois chez elle[1]. Un auteur assez inconnu[2] nous initie, par un récit plaisant, aux entretiens qui défrayaient ces doctes réunions et aux passe-temps qui les occupaient. À son origine, comme on sait, le corps institué par Richelieu avait pour mission spéciale d’épurer et de fixer la langue : les mots ne devaient être français que par un arrêt de l’Académie, qui avait sur eux juridiction suprême, chargée qu’elle était de les confirmer ou de les abolir. L’historiette suivante, que je transcris,

  1. Voyez M. de Noailles, Histoire de Mme de Maintenon. t. I, p. 101.
  2. Petit, Dialogues satiriques et moraux, in-12, 1687.