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MARGUERITE DE NAVARRE

simples, avaient un attrait des plus vifs, qu’il ne faut pas perdre de vue pour les apprécier avec justice. Marguerite, sur les sujets frivoles qui l’occupent, ne fait pas même difficulté de se répéter. Ainsi le voit-on dans la comédie de la Coche[1], qui n’est guère qu’une variante de celle qui a précédé. Néanmoins, outre le mérite d’un ton habituellement facile, on y peut relever un sentiment assez vif de la nature, qu’annonce notamment cette description du lieu de la scène, lorsque Marguerite nous dépeint


 … Le pré plein d’espérance,
Environné de ses courtines vertes,
Où mille fleurs, à faces découvertes,
Leurs grand’s beautés étalaient au soleil,
Qui, se couchant, à l’heure était vermeil
Et faisait l’air, sans chaud ni froid, si doux
Que je ne sais cœur si plein de courroux
D’ire et d’ennui, qui n’eût eu guérison
En un tel lieu…


Dans ce séjour très-plaisant se sont réunies plusieurs dames victimes d’une passion ou inquiète ou trahie, qui, avec une subtilité verbeuse, étalent leur douleur en prétendant à l’envi qu’elle n’a point d’égale. Heureusement que, pour tirer d’embarras celle que les plaignantes ont prise pour confidente et arbitre de leurs chagrins, un orage survient, qui met fort à pro-

  1. Le coche, disait-on aussi vers cette époque (voyez les Commentaires de Montluc, in-folio, 1592, p. 112), et a-t-on dit généralement depuis : c’était une voiture. On trouve encore ce mot avec ce sens chez La Fontaine ; de là cocher.