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MARGUERITE DE NAVARRE


 ELPISON.

Ce fagot aura pour chauffage :
Il fait froid en cette saison.

 NÉPHALLE.

Mon flageolet pour son usage :
L’enfant en aimera le son.


À cette suite de scènes sans péripétie, mêlées de chants du chœur, succède la Comédie de l’Adoration des trois rois à Jésus-Christ, où figurent Dieu et ses anges ; divers personnages allégoriques : Philosophie, Tribulation, Inspiration, Intelligence divine ; les rois qui adorent le Christ ; Balthasar, le type des ambitieux déçus et repentants ; Melchior, atteint par l’infortune au sein des grandeurs de la terre ; Gaspard, conduit par la pureté de son cœur au-devant de la parole divine ; enfin Hérode, avec ses docteurs et ses serviteurs. Ici l’on remarque d’abord, pour la conception comme pour le langage, ce goût d’abstraction qui, depuis le Roman de la Rose, régnait dans notre littérature ; en même temps, et ce qui vaut mieux, on y trouve en foule des maximes de morale ou de philosophie chrétienne, et des lambeaux de l’Écriture reproduits dans un style diffus, qui plaît néanmoins par la naïveté de son accent. Tel est ce passage que Joseph adresse à ceux qui saluent le Christ dans son berceau :


Bien soyez-vous venus, sages seigneurs,
Des autres rois l’exemple, et enseigneurs
Du sur chemin qui au vrai salut mène.
Souffert avez grands travaux et douleurs :
Car tel chemin ne se fait sans labeurs.