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CARACTÈRES ET PORTRAITS.

est, sans vaine pompe et sans bruit, d’une efficacité vraiment durable : telles sont les œuvres de l’esprit qui, après avoir éclairé et enseigné les contemporains, retiennent auprès de la postérité cette influence salutaire. De là une prédilection marquée de nos jours à revenir, par un sentiment d’utilité autant que de justice, sur les vies longtemps obscures de ces ouvriers de la pensée dont le dévouement avait été trop souvent payé de peu de reconnaissance. C’est qu’il faut aux peuples comme aux hommes la maturité de l’âge, pour apprécier à leur valeur les produits de l’intelligence et pour en élever les conceptions à la dignité des actes.

Le seizième siècle, signalé en Europe, et notamment en France, par un si grand mouvement intellectuel, nous offre surtout beaucoup de ces gloires laissées dans l’ombre, mais dont le fondement solide repose sur des services rendus à la raison humaine : ce sont elles que l’histoire littéraire s’applique maintenant à renouveler. Non contente de perpétuer le souvenir de ces hommes bien rares, dont le nom rappelle des chefs-d’œuvre, elle a pensé que toutes les carrières laborieuses renfermaient des enseignements utiles ; et plusieurs écrivains, dont la modeste existence n’avait pas pressenti un tel honneur, ont trouvé dans notre époque de studieux biographes.

Avant de traiter spécialement ici de Henri Estienne, il est à propos de se reporter aux origines mêmes de l’illustration que sa famille s’est acquise à différents titres durant tout le seizième siècle et une grande par-