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L’ESSENCE DU CHRISTIANISME

ni Fils de Dieu, excepté celui qui est né de la vierge Marie et qui s’est incarné. » Luther fait par conséquent des éloges à saint Bernard et à Bonaventure, d’avoir insisté sur l’humanité du Christ.

En d’autres termes : dans le catholicisme, l'homme est pour Dieu ; dans le protestantisme, Dieu est pour l’homme. Le catholicisme connaît bien un Dieu qui existe pour l’homme, mais le protestantisme a l’honneur d’en avoir tiré le premier un résultat important : celui de la valeur absolue de l’homme.

« Jésus Christ, notre Seigneur à nous, a tout fait et tout souffert : il l’a souffert et fait pour nous ; il est né pour nous, martyrisé pour nous, crucifié pour nous, mort pour nous, enterré pour nous, et ressuscité pour nous ; il est assis, pour nous, là-haut avec le Père tout-puissant, d’où il descendra encore une fois pour nous quand il jugera les morts et les vivants. C’est précisément ce que les saints Apôtres et les très chers Pères ont voulu dire par les mots pour nous et pour notre Seigneur ; car enfin le Christ est à nous, il est le Nôtre, il va nous secourir… Vous devez donc toujours énergiquement appuyer sur le mot le Christ (Luther, XVI, 538).  » — « Pour moi, je ne connais aucun autre Dieu que celui qui a été donné (immolé) pour moi (III, 589). » — « Dieu s’est fait homme, c’est-à-dire il s’offre à l’homme comme un mari à sa femme. Or, comme Dieu nous appartient, toutes les choses de l’univers nous appartiennent de même (XII, 283). » — « Dieu ne saurait être un Dieu des trépassés, qui ne sont nulle part, c’est plutôt un Dieu des vivants. Si Dieu était un Dieu des morts, il serait comme un époux qui n’a pas de d’épouse, ou comme un père qui n’a pas de fils, ou comme un maître qui n’a pas de serviteur. Voilà deux choses qui se tiennent l’une l’autre : un époux et une épouse, ou un père et un fils, ou un maître et un serviteur ; à moins qu’il ne soit que la statue d’un maitre, que le portrait d’un père. » — « Dieu, c’est celui dont on doit attendre les plus grands bienfaits… En effet, s’il restait là-haut assis sans s’occuper de nous, il serait comme une idole de pierre ou de paille, il ne nous ferait rien de bon, il ne ferait rien du tout … S’il était assis dans le ciel, pour lui seul, comme une bûche de bois, il ne serait point Dieu (XVI, 465). » — « Dieu dit : Je suis le Créateur du ciel et de la terre, je suis ton Dieu à toi. Eh