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L’ESSENCE DU CHRISTIANISME

Personnalité de Dieu dont ils viennent de parler. Ils mêlent ensemble la Personnalité et l’Impersonnalité.

Dieu comme Esprit pur, Substance pure, ne convient qu’à un homme abstrait, à celui qui se trouve heureux et tranquille dans l’intuition des choses objectives, dans les études astronomiques, dans les recherches de ce que Hegel appelle la raison qui est dans les objets. De là l’aversion de Jacobi pour le Dieu-substance de Spinoza. Voulez-vous, personnalistes, construire logiquement l’idée de la Personnalité, alors vous ferez bien de la réduire à celle de l’homme naturel et concret, rayez hardiment la personnalité de celle-ci, n’y mêlez jamais la nature impersonnelle. Et en effet, pourquoi voulez-vous expliquer la Nature ? Vous avez posé la Personnalité comme vérité absolue, et à côté d’elle l’Impersonnalité ne signifie plus rien ; Dieu est ici UN, et la Nature n’est que ZÉRO.


Chapitre XI.

Le Mystère de la Providence et de la Création.


La Parole divine prononcée, c’est la Création ; prononcer une pensée est un acte de la volonté, la Création est un produit de la volonté. En d’autres termes : Dieu a crée le monde signifie, la volonté est divine, absolue. Mais cette volonté n’est point celle de la raison, c’est plutôt la volonté de l’imagination, la volonté du bon plaisir, la volonté subjective et illimitée : « Pourquoi Dieu a-t-il fait le ciel et la terre ? Parce qu’il la voulu (Quare fecit Deus cœlum et terram ? Quia voluit) » Et Aurèle Augustin continue : « Ainsi la volonté de Dieu, qui est la cause de leur existence, est plus grande que le ciel et la terre. Et si vous vous demandez : pourquoi l’a-t-il voulu ? Vous faites une question plus grande que la volonté divine, or il n’y a rien qui soit plus grand que cette volonté (Sur la Genèse contre Manichée, 1, 2). » C’est bien là, ce nous semble, le point culminant du principe subjectif.

L’éternité de la matière ou de l’univers, veut dire que la matière