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LA RELIGION

peut se figurer des positions et des directions contraires et en nombre infini ; mais comme il s’aperçoit que, si cette direction était changée, avec ce changement disparaîtraient une foule de conséquences utiles et bienfaisantes, alors cette suite de conséquences devient pour lui le fondement du choix qui, dans l’origine, a été fait de cette direction entre mille autres qui n’existent que dans sa tête, choix fait par conséquent avec une admirable sagesse. C’est ainsi que pour l’homme, immédiatement et sans distinction aucune, le principe de la connaissance est le principe de l’existence, l’objet pensé, l’objet réel, l’a posteriori, l’a priori. L’homme se représente la nature autrement qu’elle n’est ; rien d’étonnant qu’il lui donne pour cause un être différent d’elle et qui n’existe que dans son imagination. Il renverse l’ordre naturel des choses, place le monde sur la tête, la pyramide sur son sommet. La chose première dans l’intelligence, le but pour lequel quelque chose existe est pour lui la chose première dans la réalité, la cause productrice. Voilà pourquoi il fait de l’être intellectuel non-seulement en logique, mais encore dans le monde réel, l’être primitif et fondamental.

XL

Tout le secret de la téléologie repose sur la contradiction qui existe entre la nécessité de la nature et l’arbitraire de l’homme, entre la nature telle qu’elle est réellement et la nature telle que l’homme se la représente. « Si la terre se trouvait partout ailleurs, à la place de Mercure, par exemple, tout sur sa surface serait détruit par l’intensité de la chaleur. Combien