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LA MATIÈRE ET L’ÂME

Bardes à la forme hardie,
Au dire large et saisissant,
Dont le vers jamais ne mendie
Trait vif ou coloris puissant,
Pourquoi vos strophes opulentes
Aux airs frais, aux laves brûlantes,
N’ont-elles pas de sève au sein ?
Pourquoi toujours le corps sans l’âme ?
La matière, hélas ! sans la flamme ?
L’argile où manque le feu saint ?

Votre maîtresse, votre idole,
C’est la matière, c’est le corps.
« Beaux ciseleurs de la parole, »
Vous ne sculptez que le dehors.
Vous savez prendre à la nature
Et sa charpente et sa structure,
Son ciel, son arôme et ses fleurs ;
Vous savez entendre ses brises,
Qui seraient volontiers surprises
De vos ruisselantes couleurs.