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NICAISE.

Très-bien ! Très-bien ? — J’enrage ! Il dit à tout : très-bien !
Mais, jour de Dieu ! monsieur, savoir par cœur n’est rien.
Savoir… quoi ? — Débiter les tirades… par tranches ?
Il faut le sentiment — l’habitude des planches.

MONDOR.

Assez !

À Gauthier.

Vous, dites-nous quelques vers au hasard !

GAUTHIER.

J’en sais de Tabarin, qu’on croirait de Ronsard !

Il récite, de manière à faire sentir à Francisquine que c’est à elle que s’adressent les vers suivants.

« L’amour ? ouy, c’est l’amour qui m’afflige et martelle,
Qui me fait soupirer en mes tristes ennuis,
C’est luy qui me causa cette playe mortelle,
Et qui fait que les jours ne me sont que des nuits.

C’est le cruel amour qui me tient et maîtrise,
C’est luy qui me tourmente et qui me fait mourir,
C’est luy qui me blessa et lequel me méprise,
Alors que je le pry me vouloir secourir…

C’est luy qui m’attira cette flamme cruelle
En formant dans mon cœur mille horribles tourments,
Dès le jour que je vy ma mignonne Isabelle,
Isabelle ! l’objet de mes contentements.

Isabelle, la fleur, de toutes les plus belles, —
Qui porte dans ses yeux mille brillants flambeaux,
Qui surpasse en blancheur les blanches colombelles,
Et surmonte en douceur la douceur des agneaux.

Isabelle, qui est toute ma douce amie,
Mes soulas, mes plaisirs, ma joye et mon support,
Tout l’appuy et soutien de ma mourante vie,
Et tout l’allégement de ma vivante mort ! »