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« Bonsoir ! — Bonsoir ! »
Deux mots aigres sont bientôt dits ;
Et pour n’entendre pas qu’on vous appelle : ivrogne,
On crie à la coquine ! à la chienne !… et l’on cogne !…

TABARIN.

Donc, c’est moi qui fais tout le mal au cabaret ?

FRANCISQUINE.

Certes !

TABARIN.

Certes !Qui l’entendrait, par le ciel ! la croirait !
Tiens ! va-t’en ! Par l’enfer !
va-t’en ! ou crains qu’il pleuve
Des coups ! Ce n’est donc pas assez qu’elle m’abreuve
De honte et de douleur ! En suis-je assez haï ?
Elle me nargue encore après m’avoir trahi !…
Misérable ! Femelle hypocrite et rusée !
Je ne suis plus, par toi, qu’un objet de risée,
Ma honte pour personne, hélas ! n’est un secret,
Et c’est moi qui fais tout le mal au cabaret !
C’est moi seul qui suis sans pudeur et sans vergogne !
Mes soupçons ne sont rien que visions d’ivrogne !
Toi, tu demeures pure et chaste à la maison !
Je t’accuse sans droit ! je te bats sans raison !
Oh ! le cruel boucher de l’agnelet sans tache !
— À ton tour ? Est-ce vrai ? — si je n’étais un lâche,
Moi, je t’étranglerais de ces mains que voilà !
Ô rage ! Certes oui ! je suis un lâche ! elle a
Des amants, je le sais, je les ai vus, peut-être,
À la brune, vingt fois, rôder sous la fenêtre,
Lorgnant du coin de l’œil la porte d’où je sors !…
— Jure qu’ils n’entrent pas sitôt que je suis hors ?
Jure le ! ce n’est pas qu’un parjure te coûte !
Dis que c’est des soupçons absurdes que j’écoute,
Mens ! car tu sais mentir ! mens ! mais défends-toi donc !

FRANCISQUINE.

Me défendre ? Pourquoi pas demander pardon ?
— Pour élever la voix, crois-tu que je te craigne ?