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TABARIN.

J’ai l’avantage, au moins, que tu ne peux nier,
De n’être pas boudeur, femme, ni rancunier.

FRANCISQUINE.

Vive Dieu ! c’est un rare exemple de clémence
Que de traiter ses torts avec cette indulgence !

TABARIN.

À quoi bon raviver des reproches anciens ?
Mes torts ! chacun de nous n’a-t-il pas eu les siens ?

FRANCISQUINE, passant n° 1.

Mes reproches, à moi, n’ont pas formé de gaule,
Et mes torts ne font point des marques sur l’épaule !

TABARIN, n° 2.

Non. C’est tout autre chose, il est vrai ! mais l’affront
N’est pas moindre… et cela s’imprime sur le front !

FRANCISQUINE.

Merci ! vous revoilà vos visions cornues !

TABARIN.

Mes visions ne sont rien moins que saugrenues.
J’ai dix mille sujets pour un d’être jaloux,
Et je sais de quel bois on se chauffe chez nous !

FRANCISQUINE.

Comme moi, de quel bois est faite votre épée !

TABARIN.

La patience m’est quelquefois échappée.
Si de t’aimer, du moins, je me pouvais guérir ?
Mais non, rien n’y fait, rien ! plus tu me fais souffrir,
Et plus à ta beauté mon âme s’acoquine !
Infidèle et sans cœur, je t’aime, Francisquine,
Comme un chien…

FRANCISQUINE, à demi-voix, à part.

Comme un chien…Enragé…

TABARIN.

Comme un chien… Enragé…Comme un fou…

FRANCISQUINE, à demi-voix, à part.

Comme un chien… Enragé… Comme un fou…Furibond !