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se reflète dans chacune des auges. Il se cache lui-même derrière un rocher et attend, tranquille et calme, l’arrivée du serpent.

Le soleil avait disparu derrière la montagne. La lune venait de se lever. Tout à coup, dans le lointain, on put apercevoir comme seize étoiles de diamant qui brillaient d’un vif éclat dans la profondeur de la nuit. Ces étoiles se rapprochèrent. C’étaient les yeux pétillants de convoitise des huit têtes du monstre. Il s’en vint tout près de la cabane et fit entendre à la fois huit sifflements aigüs. Le vieillard et sa femme tremblèrent. Ce cri leur rappelait leurs sept filles mortes et le danger que courait leur chère Inadahimé.

Le serpent, attiré par l’odeur du saké, s’approche avec lenteur, et ses huit têtes se lèvent d’un même mouvement. Il aperçoit dans chacune des auges le visage de celle qu’il cherche. Son énorme queue bat un moment l’espace, signe de son immense joie. Les huit têtes plongent aussitôt, et le monstre, d’un seul trait, avale la précieuse liqueur, jusqu’à la dernière goutte. Mais aussitôt ses regards se troublent, le vertige de l’ivresse le saisit, il s’étend sur le sol, puis se replie sur lui-même et s’endort.

Susanoonomikoto sort à ce moment de sa cachette. Il tire son sabre du fourreau et, d’une main habile, abat l’une après l’autre les huit têtes du monstre, dont le corps bondit en des contorsions effrayantes.

Le dieu veut achever sa victime. Il la découpe