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ému jusqu'aux larmes, remerciez le ciel de m'avoir aujourd'hui envoyé près de vous. Je vais rester jusqu'à la nuit tombante. J'attendrai le serpent. Je le tuerai de ma main, et sauverai votre fille.

Le vieillard le regarda, et lui sourit tristement :

— J'admire, lui dit-il, votre bravoure et votre bonté. Mais, hélas! vous ignorez à qui vous avez à faire. Non, non; ne vous exposez pas; vous y perdriez inutilement votre précieuse vie.

— Et vous, noble vieillard, répond alors le dieu, se redressant de toute la hauteur de sa taille, vous ignorez quel est celui qui vous parle et vous promet le salut de votre fille. Apprenez-le donc. Je ne suis point un homme. Je m'appelle Susanoonomikoto, je suis le frère de la déesse Amatérasu.

À ces mots, le vieillard, sa femme et sa fille, tremblants à la fois de crainte et de bonheur, se prosternent et adorent ; puis, joignant les mains et s'avançant à ses pieds, le remercient d'être venu près d'eux pour leur porter secours…

Le dieu se dirige seul vers la montagne. Il prend huit énormes blocs de pierre et les transporte devant la cabane. Puis, il prononce sur elles quelques paroles mystérieuses, et les pierres se transforment en auges. Il les remplit ensuite avec l'eau de la rivière, frappe trois coups sur chacune d'elles de la pointe de son sabre, et cette eau se transforme à l'instant en saké délicieux.

Il fait placer ensuite la jeune et belle Inadahimé sur un petit monticule, de façon à ce que son visage