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des êtres humains, conclut le dieu par un raisonnement logique.

Il part aussitôt et longe, en le remontant, le cours de la rivière. Il se trouve bientôt en face d’une cabane, à moitié délabrée, sise sur le penchant d’une haute montagne. Susanoonomikoto s’approche en étouffant le bruit de ses pas, et à travers les fentes d’une porte mal jointe regarde l’intérieur. Il y voit un vieillard grisonnant, une vieille plus grisonnante encore et une jeune fille de dix-huit à vingt ans. Le vieux et la vieille pleuraient, assis auprès de leur petit brasero. Ils paraissaient comme accablés sous le poids d’un immense chagrin. La jeune fille ne pleurait point, mais sur son visage se lisait sans peine l’expression d’une grande mélancolie et d’une douce résignation.

Elle était d’une beauté extraordinaire. Le dieu n’avait jamais pensé que parmi les mortels, il pût se rencontrer de si belles et si ravissantes créatures. Il éprouva à sa vue un je ne sais quoi d’intime, qu’il n’avait encore jamais éprouvé. Lui, qui descendait des hauteurs du Takamagahara, subit les charmes d’un amour ardent pour cette humble fille de la terre.

Il entrouvrit doucement la porte et sans bruit pénétra dans l’intérieur dee la cabane. La jeune fille, à sa vue, poussa un cri d’effroi et se précipita vers sa mère. Le vieillard et sa femme levèrent la tête et leurs regards étonnés fixèrent avec crainte le voyageur inconnu. Susanoonomikoto était beau, lui