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son père, sa femme et ses enfants, pour apprendre de leur bouche le pourquoi de ce qui l’étonne. Il se dirige vers sa demeure. Là, sa surprise redouble. C’est bien cette maison qu’il a quittée, il y a sept jours. Mais elle tombe en ruines. Il s’approche et jette un coup d’œil à l’intérieur. Il n’y voit aucun des objets qui lui étaient familiers. Il n’y retrouve ni son père, ni sa femme, ni ses enfants.

Sur la natte, un vieillard est assis, les bras appuyés sur le bord du brasero, mais ce vieillard n’est pas son père ! Taro va défaillir sous le poids d’une émotion trop forte. Il se contient pourtant encore.

— Bon vieillard, demande-t-il d’une voix étouffée, il y a sept jours que j’ai quitté ce village. Tout y a changé depuis. Cette maison est à moi, et je vous y trouve, vous, un inconnu. Où sont donc mon vieux père, ma femme et mes enfants, que j’ai laissés ici ?

— Jeune homme, répond le vieillard, qui croit avoir à faire à un fou, je ne sais ce que vous voulez dire. Qui êtes-vous donc ? Quel est votre nom ?

— Je suis Ourashima Taro, le pêcheur.

— Ourashima Taro ! s’écrie le vieillard au comble de la surprise, mais alors, vous êtes… un fantôme… un revenant… une ombre !… J’ai souvent, en effet, entendu parler d’un certain Ourashima Taro. Mais, voilà bien longtemps qu’il n’est plus de ce monde. Il y a sept cents ans qu’Ourashima Taro est mort !

— Sept cents ans ! s’écrie le pêcheur.

Aussitôt il pâlit et chancelle. Ces dernières paroles du vieillard sont pour lui comme un trait de lumière.