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ENTRE DEUX RIVES

Mes affaires marchaient bien, je les soignais du reste au mieux ; bref, j’étais content de ma situation. Pour m’être agréable, maman et sœurette vinrent habiter avec moi la maison attenante à l’usine, et nous vivions tous les trois heureux… quand la guerre éclata.

Depuis, j’ai appris que les Allemands ont réquisitionné partout les huiles et les suifs, tous les objets en cuivre des usines, toutes les courroies des machines et peut-être bien d’autres choses encore.

En quel état vais-je retrouver ce restant de matériel inactif depuis au-delà de quatre années ? Je n’ose et ne veux y songer. Plaie d’argent n’est point mortelle ! Si j’ai enfin le bonheur de rentrer sain et sauf « chez nous », je ferai bien vite renaître le va-et-vient de jadis : la rouille des matériaux sera vite enlevée, et nous huilerons double s’il le faut. S’il plaît à Dieu j’aurai encore des beaux jours !… C’est bien là votre souhait ?…

Le temps est au beau maintenant… Hier il a plu toute la grande journée, ce qui nous a valu une nuit paisible… Nous n’en étions pas fâchés !

Nous nous attendons à quelques bombardements aériens ce soir. Depuis plusieurs nuits les Boches lancent sur nos baraquements des bombes incen-