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désœuvrés. Mais la croix commençait à peser sur son épaule plus qu’il ne l’avait d’abord supposé.

Du reste, le malheureux Robert semblait destiné ce jour-là aux fâcheuses rencontres ; car à peine eut-il fait quelques pas, qu’il se trouva en face de l’école. La classe finissait, et les écoliers s’élançaient dans ce moment sur la route, disposés à profiter de toutes les occasions d’espiègleries qui se présenteraient.

Robert fut pris d’une terrible inquiétude, et il lui semblait déjà entendre des huées s’élever derrière lui.

Ses craintes ne tardèrent point à se réaliser. À peine eut-il dépassé la porte de l’école, qu’un long cri de moquerie s’éleva, et que cinquante écoliers au moins se mirent à le poursuivre en le montrant du doigt, et en faisant voler en l’air bonnets et casquettes.

— Regarde, regarde, s’écriait l’un, il a l’air d’un mouton marqué pour la boucherie.

— Ne vois-tu pas, répondit un autre, qu’il vient de se faire croisé, et qu’il part pour la Palestine.

Et les huées et les éclats de rire de recommencer plus fort.

Robert devint pâle de colère ; il se détourna comme un dogue hargneux poursuivi par des enfants, et peut-être se fût-il cruellement vengé sur ses jeunes persécuteurs, si le maître d’école, ne se fût tout-à-coup montré à la porte de sa maison.

Robert s’avança vers lui en se plaignant que la classe ne fût composée que de vauriens et d’insolents.

Le maître lui répondit doucement qu’il ne voudrait pour rien au monde encourager l’impertinence de ses élèves, mais que la croix blanche qu’il avait sur le dos pourrait faire rire des gens plus sages que des écoliers.