Page:Ferdinand Henaux - Études historiques et littéraires sur le wallon, 1843.djvu/83

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 79 —

Ji m’ laireu petté m’cou,
Dihév li femm dà Geòr,
Poz alé à Wihou
Li pu bai joû del Fòr…
Oh ! puski v’fâ petté ’n sakoi,
Riprit Geôr, contin com on roi,
Vost èveie pasret âheiemin :
Ji v’ pettrai l’gueue, et v’ n’iré nin.

Au reste, cette trivialité est un défaut qu’encourt toute composition éminemment populaire. De nos jours cependant, on a tâché d’éviter ces défauts. On a mis une corde de plus à la lyre wallonne et on l’a montée jusqu’au ton de l’ode. L’auteur s’en est bien trouvé : sa poésie a quelque chose d’élégant, de simple, mêlé de douce tristesse même ; c’est l’âme remplie d’amertume et de patriotique douleur qu’il regrette l’indépendance du sol liégeois. Ses regrets, ses souvenirs d’une nationalité qui n’est plus, et dont il a été l’heureux témoin, respirent une mélancolie qui charme le lecteur : tout y est neuf, même le rhythme. Le sujet est le couvre-feu de Liége, nommé Coporeil[1] :

  1. L’auteur, en écrivant Kopareie, semble vouloir indiquer que le nom de cette cloche lui est venu de ses vibrations uniformes. C’est une erreur partagée, chose étonnante, par presque tous les Liégeois. C’est coupe-oreille que l’on doit écrire, mot prononcé en wallon côp-oreie. Nos documents législatifs sont d’accord avec cette étymologie. Les ribauds, truands et voleurs domestiques étaient ordinairement punis par l’essorillement, qu’on regardait comme un châtiment ignominieux. C’est surtout quand on les avait arrêtés vagabondant après le couvre-feu, qu’ils encouraient cette peine. Le Coporeil sonnant, les portes de la cité se fermaient, toutes les lumières s’étei-