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Mais depuis l’invasion française et l’incorporation de notre pays à la France, nous le répétons, la langue parisienne devenant d’un usage journalier, le wallon en reçut des atteintes qui lui ont fait perdre de son originalité. Aujourd’hui, il est presque impossible d’écrire dans cet idiome sans être plus ou moins dominé par la langue de nos voisins du midi, qui vous suggère subtilement ses paroles et ses tournures. On éperonne vainement l’imagination ; peu meublée de lectures classiques, elle se retourne, étonnée, en s’écriant :

Ki dirège ?
Allon, ça, dihém ès Françai
Souk i fâ ki j’deie ès Ligeoi[1].

On n’écrit plus alors que du français wallonisé c’est-

    autre accès de colère contre le wallon : c’est les cheveux dressés sur la tête, les yeux sortant de leur orbite sans doute, que cet original écrivain s’écrie : « Que notre abject et insignifiant jargon cesse donc tout à fait d’être l’interprète de nos idées ; rougissons de l’avoir trouvé beau et d’avoir pris si longtemps sa dureté pour de l’énergie, et sa grossièreté pour de la naïveté ; changeons en mépris, changeons même en haine et en horreur l’attachement aveugle et extravagant que nous avons eu jusqu’à cette heure pour lui ; mettons, etc. » — Galerie de portraits d’Auteurs et d’Artistes Liégeois, p. 11. — Un autre Liégeois avance avec plus de vérité que la proscription du wallon porta une grave atteinte à notre nationalité « Plus de wallon, partant plus de bonacité, mais fredonnement d’airs lubriques, insultes en mauvais français à la religion de nos pères, etc. L’établissement d’une société d’Émulation pour les belles-lettres et les arts fut le dernier coup, etc. » De Trappe : Œuvres diverses, etc. ; Paris, 1803, in-8º, p. 89.

  1. Prologue po ravisé on complimen chanté ell sâll d’Assemblaie sol Pless des Jesuittes li nouf fevrîr 1762. Liège, in-8º. V., page 3.