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En prenant le thé.

Quelle joie de le voir sourire, et quelle douleur de le voir pleurer !

Oh ! j’ai passé par là, moi aussi, mignonne ; va, n’aie pas honte de ce bonheur-là, tout naïf qu’il est ! — je sais ce que c’est, et j’y trouve un regain de mon bonheur passé, c’est ma jeunesse de la Saint-Martin.

— Bon père, interrompait-elle.

Et ses yeux se mouillaient de larmes, quand elle voyait ma pauvre tête branlante.

— … N’est-ce pas que c’est bon d’aimer son enfant ? Si tu savais quel bonheur ce fut pour nous de surprendre ton premier sourire et de diriger tes premiers pas !

Ta bonne mère, accroupie devant toi, te faisait, de ses deux bras allongés, un double soutien ; quand tu avais fait un petit progrès, quand au lieu de deux, tu avais marché trois pas, elle m’appelait pour venir voir, et comme deux grands enfants, — mais deux enfants heureux, — nous nous asseyions par terre pour te mieux voir.

Je me souviens des douces et bonnes heures que je passai à t’apprendre à bégayer : Maman. — Tu ne pouvais pas, mignonne ; mais je le désirais tant, que je parvins à te le faire dire.