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62 SÉBASTIEN CASTELLION —nisation. On n’a pas accumulé pendant plus de dix siècles Vexpérience du commandement absolu, l’exercice d’un sacer- doce qui est bien plus qu’un empire, la connaissance des hommes et des nations, la science suprême de la direction des affaires humaines, pour se laisser désarmer par l`insur— rectiou de quelques prêtres, la fantaisie de quelques lettrés et l’avidité de quelques princes. Les défections du premier moment sont dues it la surprise, et la soudaineté de l’attaque, a l’irrésolution de la défense. Prévenue maintenant, l’Ég·lise n’a qu’a s’aflirmer pour s’alfermir. Elle a pour elle la force : qu’elle en use; le bras séculier : qu’elle y recoure; les lois : qn’elle les fasse appliquer. Avant tout, il faut frapper l’imagination du peuple. C’est déja admettre le premier venin de l`l1érésie que de condes- cendre a donner ses preuves la Bible at la main. Si par fai- blesse on laisse impunément traiter des niatieresreligieuses ces lettrés, ces érudits, ces « païens », tous ces novateurs déguisés; si, par respect pou1· les livres saints, on n’ose pas en interdire pu1·ement et simplement la lecture et la prepa-. gation en langue vulgaire, le résultat final sera, dans le reste de l’Europe, le mème qu’en Allemagne, où l’on a tout perdu pour n’avoir pas su tout refuser it temps. C’ûtait le génie meme de l’Eglise qui par la bouche du légat Campege avait dicté, des 1530, la vraie, la seule solu- tion, l’emploi énergique du triple moyen de défense 1 ligue armée de tous les princes catholiques, — destruction des hérétiques par le fer et le feu, —— établissement d’une inqui- sition étendue et'perfectionnée ’. C’est d’avance tout le pro- gramme de la contre—révolution, sauf un article capital, mais qu’on ne peut reproche1· a Campege de n’av0ir pas deviné : la création de la compagnie de Jésus. — ll était réservé it un homme d’une farouche énergie de reprendre ce programme et d’en tirer le triomphe de lÃEglise. Quel tour eussent pris les affaires de Rome sous Paul III, après ce début de pontificat que nous venons de voir accueilli par tant d'espérances de réforme, si derrière ce pape encore I. Miclielet, His!. de 1i'2·ance,t. III, p. 302. —- Nisard, Études sur la Renaissance, ll, 275.