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ÉPILOGUE PAR BASILE MONTFORT. 407 nom soit sanetifie, que son royaume advienne? tous ne prennent-ils pas peine nuict et jour d’acquerir grandes richesses? Voudrois tu pourtant que le Magistrat les mit tous a mort? ` Vien ça : si tu estois Magistrat, voudrois tu occir ces enfants là qui se moquoient d’Elisée‘? Tu ne le devrois faire : car tu n’as nulle Loy, qui commande d’oceir les moqueurs 1 et le Magistrat nepeut nul occir sinon par le commandement de la Loy ‘. Quelle est ceste raison : « on punit justement les adultères, les homi- cides, les imposteurs et blasphemateurs; on occira donc justement les faux prophètes et hérétiques »? qu’est tout ainsi comme si tu disois, celui qui hait son frère, est homicide : parquoy il doit estre mis a mort. _ Il est vray, il doit estre mis ii mort, mais c’est du glaive spirituel z car il a commis un péché spirituel. Et en dy tout autant d’un hérétique 2· Quelcun que vous cognoissez bien l’a sectaire par ces parolles : « l’Église n’usuope rien at elle de ce qui est propre au Magistrat, ne aussi le Magistrat ne peut faire ce qui est fait par l’Èglise » 3. Lesquelles parolles si tu con- fesses estre vrayes, le lllagistrat n`eut sceu tuer Ananias, n’aucun certes des heretiques, ou de ceux qui doivent estre punis pour la parolle : et ne peut pas le Magistrat faire mieux l’office de pasteur, que le pasteur l’offiee de Magistrat. Le magistrat doit défendre les bons contre la force, mais de faire des bons par force ou de donner la religion par le glaive, il ne le peut^. ' Pourquoy brouillons nous tout : si vous avez la parolle, contentez vous d‘icelle, et punissez par icelle les heretiques, les hypocrites, avaricieux, etc., _ et laissez le Magistrat punir les criminelz par glaive, et redemander œil pour œil, dent pour dent, et vie pour vie, et argent pour argent. Que si vostre parolle est foihle, laissez vivre ceux lesquelz vous ne pourrez vaincre pa1· vostre glaive, a fin que vous ne soyez semblables aux enfants dispu- 'tans aux escholles, lesquelz si quelques fois ne peuvent estre maistres de leurs compagnons par raisons, ils se jettent à leurs cheveux 5. Ce dernier trait de satire familière n’est pas le seul de cet épilogue. Il y règne comme une nuance de fine ironie où T héo— dore de Beze reconnaîtra un esprit profane. Il se demandera s'il faut prendre pour un argument ou pour une raillerie per- fide des mots comme celui-ei : Je vois en l’Église des sectes innumerables desquelles n’en y a pas une qui s’accorde avec l’autre de Pinterprétation des escritures : il les faudroit donc mettre toutes a mort, excepté une et icelle la plus petite, comme ainsi soit que le troupeau de Christ est petit 6. . 1, P. 117. 2. P. 119. · 3. Calvin, Inst. Christ., édit. de 1559, lib. VI, cup. xi, § 3. 4. P. -12s. 6. P. 118. 6. P. 111. .