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du XVe siècle, qu’il intitulait avec raison emaculatiores quam antehac prodierint umquam, Joannis Rænerii opera. Plus tard, c’était Sébastien Gryphe, qui publiait une édition (in-8, 1551) des Élégances de Laurent Valla, qu’il recommandait au public pour le soin qu’avait pris Raynier de rétablir nombre de textes défigurés jusque-là.

Bon professeur, il inspira à ses élèves des sentiments qui ont fait son principal titre à la notoriété : Gilbert Ducher, Nicolas Bourbon, Jean Voulté, n’hésitent pas à lui soumettre leurs œuvres, se rendent à ses critiques, sont fiers de ses éloges et les impriment comme la meilleure des recommandations en tête de leurs poésies[1].

Nicolas Bourbon, dans un moment d’épanchement mélancolique, s’adresse à lui comme à un sage qui, avec Gilbert Ducher, se plaît a l'écart et sait goûter dans le culte des Muses des joies inconnues à ceux qui courent les fêtes et les festins[2]. Voulté lui dédie, comme à un homme de cœur capable de répondre à son enthousiasme, sa belle oraison funèbre du premier président Jacques de Minut (1537)[3]. Étienne Dolet ne fait pas moins de cas de ses suffrages et les insère en tête de son histoire en vers de Francois Ier (1539)[4]. Dès 1532, Raynier avait à Lyon une assez grande réputation d’éloquence, puisque ce fut lui qui fut chargé cette année-là du grand discours d’apparat qu’une fois par an, à la Saint-Thomas, le consulat devait faire prononcer devant le peuple par un orateur éminent[5].

Comme tout bon latiniste de son temps, Raynier devait faire des vers. Nous ne connaîtrions son talent poétique que par les quelques petits compliments versifiés que nous venons de rappeler, si précisément notre jeune étudiant n'avait partagé l’admiration commune pour ce maître. En quittant Lyon, Sébastien Chatillon emporta une longue pièce de vers de Jean Raynier qui, sans nul doute, avait passé

  1. Voir la 10e épigramme en tête des Nugarum libri octo de N. Bourbon; les deux dédicaces en vers en tête des deux livres des Epigrammata de Gilbert Ducher.
  2. Nug., VI, Carmen XC.
  3. Christie, Ét. Dolet, p. 307.
  4. Christie, ib., p. 355.
  5. J. Rainerii Oratio de recta civitatis institutione deque republicæ tranquillitate et gloria servanda et de Lugdunensis civitatis origine. 1532, in-8. Lugduni, Trechsel.