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LE << TRAICTÉ DES HÉRÉTIQUES >> DE MARTIN BELLIE. 365 festu de l’œil de son frère, qu’il n’ait premièrement tiré la poultre de son œil. Parquoy sera beaucoup le plus seur, qu’en une si grande multi-- tude de pechez, desquelz nous sommes tous chargez, un chacun retourne à soy mesme, et soit soigneux de corriger sa vie, et non pas de condam- ner les autres. Voila la véritable inspiration de l’auteur : ni pamphlétaire ni théologien; c’est un homme pieux, d’une piété toute mo- rale. C’est la conscience seule qui le fait parler, et c’est et la. conscience qu’il s’adresse. Sa tolerance lui vient de l’Evan— gile. Elle n’a rien de commun avec l’indil`férence ou le scep- ticisme : chez lui, c`est la religion dans ce qu’elle a de plus intime qui proteste contre le faux zele pour la religion. L’objet de ce petit recueil — Martin Bellie nous le dit — est de répondre 21 ces deux questions : Qu`est-ce qu’un héré- tique? -— Et comment faut-il le traiter? Ala seconde question, Bellie laissera répondre « les docteurs anciens et modernes dont il a recueilly et amassé les sen- tences, afin que, apres avoir considéré diligemment leurs raisons, on ne peche plus doresnavant si grièvement en ect endroit >>. · Nous allons tout et l’heure entendre parler ces docteurs., L’éditeur nous prévient que c’est aux modernes qu`il fera ses emprunts les plus larges : ils ontdù traiter la question plus at fond que les Peres de l’Église, qui n’ont guere connu en fait de persécution que celle des gentils contre les chrétiens. Mais parmi les modernes que l’on va citer, il en est peut- être qui, apres avoir écrit ce qu’on va li1·e, ont changé _ d’avis : Car il advient souventefois que ceux-là qui viennent à l’Evangile, sen- tent etjugent très bien des affaires de la religion, pendant qu'ils sont. povres et at`fligez,mais que, par après, estant eslevez en richesses et cons- tituez en authorité, ils s’abbatardissent et alienent tellement qu’eux qui paravant défendaient Christ et la vérité défendent maintenant et approu-- vent les menrtres et colloquent la vraye piété en force et violence. Y « Ce nonobstant, dit—il, nous nous en tiendrons et leur pre- miere sentence, a celle qui a été ecrite au temps de la tribu- lation :· car on ne saurait croire it personne du monde plus. seurement qu’aux ealamiteux et aftligez. » A