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LE SUPPLICE DE MICHEL SERVET. 359 qu’il ne faut pas réprimer par le glaive les hérétiques. Plaise a Dieu que les pasteurs de cette Eglise se réveillent, même tardivement, pour que le mal ne s’étende pas plus loin *! Le lendemain, Th. de Beze écrivait au même Bullinger 3 Je pense que vous avez vu un petit livre publié ce mois-ci : cle Hazreticis non puniendis, avec une préface d’un certain Martinus Bellius et une · réfutation (des objections) par Basile Montfort. On y a mis le nom de Magdebourg, mais ce Magdebourg—là, si je ne me trompe, est sur le ' Rhin; il y avait longtemps que je savais que la couvaient des horreurs. Je vous prie, cher pere, s’il faut supporter ce que cet impie a vomi dans sa préface, que nous reste-t-il d’intact dans la religion chrétienne? A ses yeux, la doctrine sur la mission du Christ, sur la Trinite, sur la cène, sur le bapteme, sur la justification, le libre arbitre ou l’état des ames après la mort est inutile; ou, tout au moins, elle n’est pas indispensable au salut : les Juifs et les Turcs même croient en Dieu. L’Eeriture estquelque chose comme l’Ethique d’Aristote, pas beaucoup plus riche en doctrine, mais beaucoup plus incertaine pour nous. ll faut attendre une autre révélation. Personne ne doit être condamné comme hérétique, sous prétexte que le maître juge seul ses serviteurs, etc. Vous voyez, cher père, ât quoi cela tend 2 une fois l’Eeriture dépouillée de toute autorité, nous n’aurions plus qu’a passer au pharisaïsme, nous serions le jouet des papistes et même des Turcs. Rapprochez, je vous prie, de cette préface blasphématoire, l’épitre de Castalion entête de sa Bible 2 vous y saisirez un seul et même esprit. J‘ai donc résolu d’y répondre, mais je nrappliquerai, d’une part, a ne pas du tout blesser, je Pespère, ceux dont ils ont emprunté quelques écrits pour tâcher de nous mettre aux prises avec eux, et, d’autre part, a réfuter leurs blasphèmes non par des injures, mais par la vérité 2. Mais avant de suivre la polémique qui va s`eng·ager au- tour de CG pîllllpiliût, les COIIJGOÈUTCS (los CO11tcI11))O1‘€1iI1S SLIP son origine, étudions l’ouvrage lui-mème, et voyons s’il jus- tifiait Yextraordinaire émotion qu’il causa. 1, Opp. Calc., XV, 96. 9. Trad. du latin Opp. Cala., XV, 97. — ll ne paraît pas que Bullinger ait accueilli avec empressement cette annonce d’un nouvel ecrit. S‘il en faut croire Farel, il aurait dit du livre de Bellius : « Cest l’ouvrage d’un Allemand ivre, d’un insensé : il ne vient pas de · Jllagdcbourg, mais de Illaydebauwy (ville des fous). ll s'évanouira tout seul, il ne mérite pas qu'on y réponde, » Farel n'est pas de ect avis, Aussitôt apres une phrase où il a déploré les persécutions sanglantes déehainées sur l'Angleterre, il ajoute sans transition et sans BOUPQOUDCP SOI} ÃDCOIISÉQUBDCB Z a Je V0lNl[‘niS biûïl qllè BCZ0 PFCSSÀÈ SDH Ollïfügü GDlli.I'0 les impies hérétiques n. (Lettre a Viret, 96 avril 1554, Opp. Cala, XV, 121.) Le jeu de mots de Bullinger peut bien n'ètre pas authentique. Dans tous les cas, le 92 avril (Ibid., XV, 119), Bullinger ecrit lai-même it Calvin qu’il n’a pas encore vu lc livre (il suppose qu'il s'agit d’une piece de vers latins sur la mort de Servct que lc libraire Perna a rapportée d‘ltalie et que l‘on avait attribuée il'ab0rd it Curione.)