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' PRÉFACE A Enotmnn v1. 303 et proclamer non comme une vérité de circonstance, mais comme le principe même de la religion, cette idée nouvelle : il ne faut plus persécuter; il faut respecter la conscience de tous, tolérer l’opinion adverse et abolir a tous les degrés le régime de la contrainte en matiere de foi. Telle va être lapensée inspiratrice de ce nouveau manifeste; il plaide la meme ca.use que Calvin, mais, la reprenant de plus haut, il lui donne une portée nouvelle. L’l1eure semblait propice 1 il y avait au moins une COUP en Europe ou en ce moment des idées de conciliation pouvaient être accueillies. L’avenement d’un enfant de dix ans au trône d’Anglcterre avait été le signal de cet apaisement. Honteuse enfin des folies sanglantes de Henri VIII, l`aristocratie anglaise, groupée autour du jeune Edoua1·d VI, paraît disposée et ouvrir l’ere des réformes. L’oncle du jeune roi, Edward ' Seymour, maître du gouvernement sous le titre de Lord Protecteur, s’est déclaré pour le protestantisme, pris cette fois au sérieux. Le conseil de régence appelle en Angleterre les docteurs les plus illustres, Mélanchthon, Bucer, Pierre Martyr et le fameux prédicateur que Genève n'avait pas su retenir, qu’Augsbourg avait failli livrer a l’Empereur, Ber- nardino Ocliino; a leur suite, Londres accueille avec autant, plus de largeur que Geneve et que Strasbourg tous les pros- crits pour motif de religion. D`accord avec eux, Parchevèque Cranmer met la derniere main au Prayer Book, le second livre national du peuple anglais, car la Bible est le premier. Le jeune prince a pour gouverneur un théologien, qui est · en même temps un humaniste d.’un caractere aimable et d’un esprit sage, Jolm Cheke. Et le prince lui-même, tout enfant, est un enfant d’élite, appliqué, docile, déja pénétré de cette piété essentiellement morale que l`éducation protes- tante doit inculquer. · Est-il étonnant que tant d’heureuses nouvelles aient rempli de joie — hélas! et d’illusions —- ces hommes d’école et ces hommes d`Eglise qui ne savaient riendes affaires publiques anglaises et qui ne voyaient le monde qu’a travers leurs doux reves?