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270 SÉBASTIEN CASTELLION. pa1· sa langue. Oublieux d'eux-mêmes, ils vivent du souffle d’autrui. Il faut rivaliser non seulement avec nos contenipo- rains, mais avec ceux qui ont écrit autrefois et que nous appelons nos maîtres muets, autrement nous serons tou- jours des enfants, 2'nfantcs ‘. » U _ . Il C’est ài ce grand mouvement, aussi spontané que naïve- ment artiticiel, que notre Castellion se laissa un moment entraîner avec la même bonne foi que tant d’autres. Nous ne ferons que mentionner sa première contribution aux Muses chrétiennes : c’est son petit volume de septemb1·e 4545, qui contenait deux ouvrages de sa jeunesse, datant de Geneve, peut-être même de Lyon : un poème latin, Jonas propheta, heroico carmine dcscriptus; et un poeme grec, Upôâpoptog, sine P7·œew·s0r, id est vita Joanmls Baptistw, grœeo ca¢·~mi~ne heroico reddita. Le Jonas — l`auteur en a eu conscience — peut a peine s`appeler un poeme ; le récitsuit la Bible pas à pas, il niv avait donc place pour aucun effort d'invention. Il ne pouvait s’y trouver d’autre mérite que celui d’une bonne amplifica- tion, et celui-la s`y trouve. Ces sept cents vers sont l’œuvre ·d`un humaniste nourri de son Virgile et qui « place » heu- reusement une tempête, une description du printemps, une autre de la nuit, de l’aurore, etc., assez bien tournées pour servir de modèle a ses élèves. On peut lui savoir gré d’avoir, plus nettement encore que le récit biblique, donné à Jonas l`idée de-se dénoncer et aux matelots les plus grands scru- pules à accepter son dévouement. C’est de lui aussi et non de la Bible que sont les discours de Jonas dans le sein du monstre marin et en particulier une assez ingénieuse adapta- 1. (Fest la tin de lu très intéressante, judicieuse et spirituelle dissertation de Cœlius Calca- guinus, de Imita/ione, imprimée (p. 232) à la suite des Cynthii Jommis Buplixiœ Gyraldi Poematia, chez \\'inter, l5/14, in-S, Lilio Gyraldi approuve ees déclarations dans une lettre imprimée ii la suite et qui se résume par cette maxime : « Sumn quemque jubeto naturam et. ut dlcitur, genium sequi ».