Page:Ferdinand Buisson - Sébastien Castellion - Tome 1.djvu/263

Cette page n’a pas encore été corrigée

ANNEES un sourriuuvcxa. 945 ll y avait la, sans qu’on y fît même allusion, quelque chose de tragique qui forcément rapprochait les cœurs tout autre- ment que lllêflt pu faire même la plus noble communauté d’étudeS. C`est dans ce milieu, tout enflammé de l’ardeur du travail et ac celle du prosélytisme, que·Séhastien Castellion venait prendre une 'très modeste place, je veux dire une place d’ouvrier. ‘ — lls ne sont pas 1·ares alors parmi les lettrés qui ont tout quitté pour la Réforme, ceux qui se font. ouvriers et travail- lent de leurs mains sans gémir et sans rougir. A ne parler que de ceux que Castellion rencontre, nous nommions tout, ài l’heure ce Thomas Plater‘, le fondateur d’une famille qui - devait ètre pendant trois siècles une des gloires scientifiques de Bale: échappé de son village où il gardait les chèvres, il avait été domestique, en même temps qu`étudiant, et il avait appris l’état de cordicr chez un jeune savant lucernois ’ a qui Zwingle et Myconius avaient donné le conseil de se faire, cordier lui-mème. Un` autre savant et l’un dcsprincipaux i cooperateurs de la Réforme en. Alsace et en Suisse, le Lorrain 'Wolfgang Musculus, avait commencé, au moment où il renon- cait a sa prébende, par se faire tisserand, puis terrassier, tandis que sa femme se placait comme servante (ln en cite1·ait bien d’autres exemples parmi ces pionniers de l`Evan- gile qui, non sans raison, se trouvaient honorés de ce trait de ressemblance avec saint Paul. ' · _ Quoi que l’on pense de leurs idées, on ne peut se défendre de sympathie pour des hommes qui entendent ainsi la·vie; et, quand on les voit se séparer brusquement de la tourbe des lettrés de cour et d’antichambre qui continuent ai ne savoir vivre que de bienfaits payés en 'monnaie de poète,·‘on com- prend mieux ce que la Réforme ajoutait a la Renaissance. 1. Sur le rôle important de Thomas l*later'da1us Yorganiéalion deswêcoles ii Bale, voir Burckhurdt-Biedermaiin, chap. 1, § 2, et le texte de son plan d`études, p.> 276-283.. , 2. ll se nommait Rodolphe Collinus. Vie de T/i. Platcr, p. 6l-G?. _ 3. Melchior Adam, Vilœ GCI'm(U101'lU7lHlBDlDf]0I`llDl, p. 373. · ,