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224 SEBASTIEN CASTELLION. avait e11 même temps cette jeunesse dame, cet accent de foi, cette puissance d’entraînement qui est le don de l’ora- teur doublé d'un ascete. En vain avait-il échangé la bure du capucin contre l’habit séculier : toute une vie d’austérités se trahissait da11s ses traits amaigris, con1n1e se devinait l`l1abi- tude des grandes émotions de la chaire da11s sa voix vibrante et chaude, dans son geste, dans le feu de so11 regard, dans l’an1pleur et l’élévation naturelle de sa parole. Dès la premiere fois qu`il mentionne sa présence Geneve., Calvin, qui dit tout 21 Viret, lui dit d’un l]lOl. qu’il a pressenti un l1omme précieux, « si seulement il peut apprendre notre langue' ». En attendant, une foule d`Italiens se pressent. autour d'Ochîno et demandent it l’entendre. Quelle était au juste sa situatio11 d’esprit? Et jusqu’à quel point était défini- tive sa rupture avec Rome? Calvin ne laisse pas d’en étre inquiet. Mais Ochino plus que personne a hate de se dé- clarer. Il fait imprimer un volume de ses sermons en italie11 qui ne laisse aucu11 doute sur sa décision : il y proclame la justification par la foi. Il a e11 d`ailleu1·s bien peu de cl1ose fr ajouter à ses sermons de Venise et de Vérone pour ètre a l’nnisson des Évangéliques. Calvin n`hésite pas; il lui fait obtenir l’auto1·isation de prè- cher dans l`ancienne chapelle du cardinal. La se réunit autour du nouveau prédicateur toute la colonie italienne qui, sans former encore une Église régulièrement constituée ’, s`accroît en quelques semaines d’un nombre de familles suffisant pour justifier un culte en italien. Bientôt Calvin, écrivant ai Bullinger, Melanchthon, emploie en parlant d'Ocl1ino des termes qui dans sa bouche ne sont pas un éloge ordinaire : magnum et prœclarzam oirmn °. Il éc1·it tout expres a Conrad Pellican pour couper court à un sot propos, répandu, pa1·aît—il, a Zurich. On avait des doutes sur la correction des opinions d’©cl1ino relativement ât la Trinité, at la personne du Christ. Calvin s`en porte garant et apres mûr examen, car, a premiere vue, dit-il,je 1ne lie guère 1. Opp. Calv,, XI, 496. 2. Elle ne le fut qu'en 155*1, après l'a1·1·ivée du marquis Galeas Cnraccioli, qui fit venir de Bâle le grand prédicnteur italien Celso Martinengo. 3. Lettres du S nov. 1549 et du 1" mars 1563.