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iûfi SÉBASTIEN CASTELLION. l'impartialité, << St1·asbourg conservait encore, dans la majorité de ses représentants au moins, l’attitude sage et vraiment chrétiemie prise par ses théologiens et ses gouvernants des les débuts de la Réforme. Pencliant d`abord vers les doctrines de Zwingle, St1·asbourg s’étaitvue forcée plus tard de se ratta- cher aux luthériens d`Allemagne, dont sa situation géogra- phique lui 1·endait l’alliance indispensable. Elle avait donc adhéré presque ài contre—ceeur ai la Confession d’Augsbourg, afin de pouvoir entrer dans la ligue de Smalkalde, mais sans abandonne1· au fond ses opinions antérieures su1· la doctrine , sacramentaire. Le reve de ses hommes d`État et surtout de son g1·and Stettmeister, Jacques Sturm de Sturmeck, était de réunir dans un même faisceau toutes les forces du protestan- tisme contre l’ennemi commun. D`accord avec les théologiens alsaciens de la premiere génération, il avait essayé jadis de réconcilier Zwingle etLutl1er en personne; il s’efforcait encore de maintenir l`entente entre la Réforme allemande et la Ré- ` forme française que commençaient ai diriger Calvin, Farel et Viret ‘. >> On ne saurait donc s’étonner que les Sturm et les Bucer - aient tenu à honneur no11 pas seulement cl’accueillir, mais d’appeler a Strasbourg, des qu’ils surent son exil, le jeune réformateur de Geneve. Ils ne redouterent ni l`éclat de son talent, ni la hardiesse de sa parole, ni la nouveauté de ses doctrines. Pour eux, Calvin a Strasbourg, ce 11`était pas seu- lement un fugitif de plus recueilli dans ce vaste << réceptacle des bannis de la France 2 >>, c'était dans leur pensée le pas- teur de ce troupeau de proscrits, l’l1omme désigné pour faire de cette foule une Eglise. A cette époque, l’idée d’une Église welche n’inquiétait encore ni le sentiment allemand ni l’o1·- thodoxie luthérienue. Rien ne présageait l'étroitesse jalouse qui vingt ans plus tard devait triompher avec le théologien Marbach et dicter des mesures d’oppression, presque de per- sécution âi l`égard des protestants non luthériens. Aussi « l’Eglise gallicane >> de Strasbourg commença-t-elle en toute liberté sous les plus heureux auspices. « Elle avait 1. R. Reuss, Pierre llrully, p. 28. 2. Florimond de Rémond, p. 837. _