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Ce triste abaissement convient à ma fortune.

L'Académie se contente de dire qu'il est plus en usage au figuré : abaissement de fortune, abaissement de courage. -- Elle met pour exemples au propre : l'abaissement des eaux ; l'abaissement d'un mur ; l'abaissement du mercûre dans le baromètre ; l'abaissement de la voix, par oposition à l'élévation de la voix. -- Richelet et Trevoux ne mettent qu'abaissement d'un mur.

Au figuré, abaissement signifie ; tantôt humiliation volontaire : un parfait chrêtien doit se plaire dans l'abaissement devant Dieu ; tantôt humiliation forcée : c'est un esprit altier, qu'il faut tenir dans l'abaissement. Acad. -- Il signifie aussi diminution de crédit et d'honneur. Rich.

Dans son abaissement il vit sans espérance. Mainard.

ABAISSER, v. a. [Abècé, 2e. è moy. et long, 3e. é fer.]

Au propre, faire aller en bas ; abaisser un store ; abaisser une lanterne.

Diminuer de hauteur ; abaisser une muraille.

Au figuré, déprimer, humilier, ravaler : Dieu abaisse les superbes : " Abaisser l'orgueil de Carthage. Vaug.

S'abaisser régit à ou devant : s'abaisser à des choses indignes ; s'abaisser devant la Majesté divine.

ABALOURDIR, v. a. Rendre stupide. Il n'est que du style familier. L'Acad. le met sans remarque.

ABANDON, s. m. [2e. longue.]

État où est une persone ou une chôse délaissée. Ce mot a donc un sens passif, et se dit sans régime. -- D'abord l'Académie ne l'admettait que dans cette manière de parler adverbiale : à l'abandon ; mais dans la dernière Édition, elle met : être dans l'abandon ; il est dans un abandon général.

Dans un tel abandon, leur sombre inquiétude.
Ne voit d'autre recours que leur métier de prude.

Mol.

A l'abandon, adv. aller à l'abandon, laisser à l'abandon, tout est à l'abandon. Acad. -- Cette manière de parler ne plaisait pas à l'Auteur des Réflexions, etc. Cependant, dit La Touche, Vaugelas, d'Ablancourt et d'autres bons Écrivains n'ont pas fait difficulté de s'en servir. -- Elle paraît n'être que du style familier ; et l'usage ne l'a pas assez ennoblie pour la faire entrer dans le style élevé. Cependant laisser à l'abandon est une expres-


sion qui pourrait être utile, et elle n'a rien de bâs.

Abandon, avec le sens actif et le régime, n'est usité qu'au Palais : ce débiteur a fait l'abandon de tout son bien. Hors du Palais on dit abandonement : faire un abandonement de tous ses biens. Trev. Acad. Il ne fait pourtant pas mal dans la phrâse suivante. " Il y a peu d'hommes qui sachent faire un entier abandon de leurs opinions et de leurs pensées. Journ. de Paris. -- Abandon. Voyez Abdication.

Abandon ne choque pas, il plaît même dans cette phrâse de M. Marmontel. " Vous me désolez, Éraste, avec cet abandon de vous-même. Là, abandonement n'iroit pas si bien. Il est donc à souhaiter qu'abandon soit un peu mieux acrédité par l'usage : il ne déparerait aucun style.

ABANDONNÉ (ou Abandoné) ée, s. m. et f. [2e. lon. le reste bref : 4e. é ferm. long au fém.] Il ne se dit que d'un homme perdu de libertinage et de débauche, et d'une femme qui se prostituë : c'est un abandoné, c'est une abandonnée. Il est plus en usage en parlant des femmes. Acad. -- Il n'est que du style familier ou satirique : l'Acad. le met sans remarque.

ABANDONNEMENT, (ou Abandonement) s. m. Délaissement entier. - [2e. lon. le reste bref, 4e. e muet ; en a le son d'an : abandoneman.]

Ce mot a le sens tantôt actif, tantôt passif. " Il a fait un abandonement général de tous ses biens ; c. à. d. il a abandoné, etc. " Il est à plaindre dans l'abandonement où il est de tous ses parens, et de tous ses amis ; c. à. d. étant abandoné de, etc. -- Mais sans régime, il correspond au réciproque s'abandoner : il signifie dérèglement excessif dans la conduite, dans les moeurs ; prostitution. " Vivre dans l'abandonement, dans le dernier abandonement ; c. à. d. s'abandoner aux vices honteux, à la crapule, etc. Voyez Abandon.

Abandonement n'est pas du beau style : l'Acad. le met sans remarque. Elle dit au mot dévouement : " Abandonement entier aux volontés d'un aûtre.

ABANDONNER (ou Abandoner, avec une seule n), v. a. Abando-né. [Pron. abandoné, 2° lon. le reste bref, 4° é fermé.]

Abandoner a plusieurs sens : 1°. Quitter, délaisser entièrement : il a abandoné le pays.