Page:Fenelon - Aventures de Telemaque suivies du recueil des fables, Didot, 1841.djvu/406

Cette page a été validée par deux contributeurs.
389
LIVRE xvi.

ments dans un pays que vous n’occupez point. Souvenez-vous que tous les hommes doivent s’entr’aimer, que la terre est trop vaste pour eux, qu’il faut bien avoir des voisins, et qu’il vaut mieux en avoir qui vous soient obligés de leur établissement. Soyez touchés du malheur d’un roi qui ne peut retourner dans son pays. Polydamas et lui, étant unis ensemble par les liens de la justice et de la vertu, qui sont les seuls durables, vous entretiendront dans une paix profonde et vous rendront redoutables à tous les peuples voisins qui penseraient à s’agrandir. Vous voyez, ô Dauniens, que nous avons donné à votre terre et à votre nation un roi capable d’en élever la gloire jusqu’au ciel : donnez aussi, puisque nous vous le demandons, une terre qui vous est inutile à un roi qui est digne de toute sorte de secours.

Les Dauniens répondirent qu’ils ne pouvaient rien refuser à Télémaque, puisque c’était lui qui leur avait procuré Polydamas pour roi. Aussitôt ils partirent pour l’aller chercher dans son désert et pour le faire régner sur eux. Avant que de partir, ils donnèrent les fertiles plaines d’Arpine à Diomède, pour y fonder un nouveau royaume. Les alliés en furent ravis, parce que cette colonie des Grecs pourrait secourir puissamment le parti des alliés, si jamais les Dauniens voulaient renouveler les usurpations dont Adraste avait donné le mauvais exemple. Tous les princes ne songèrent qu’à se séparer. Télémaque, les larmes aux yeux, partit avec sa troupe, après avoir embrassé tendrement le vaillant Diomède, le sage et inconsolable Nestor et le fameux Philoctète, digne héritier des flèches d’Hercule.