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TÉLÉMAQUE.

persuader que je voulais me rendre le tyran de l’Hespérie. Nous le détromperons, dit Mentor. Télémaque le vit à Pylos, avant qu’il fût venu fonder sa colonie, et avant que nous eussions entrepris nos grands voyages pour chercher Ulysse : il n’aura pas encore oublié ce héros, ni les marques de tendresse qu’il donna à son fils Télémaque. Mais le principal est de guérir sa défiance : c’est par les ombrages donnés à tous vos voisins, que cette guerre s’est allumée ; et c’est en dissipant ces vains ombrages, que cette guerre peut s’éteindre. Encore un coup laissez-moi faire.

À ces mots, Idoménée, embrassant Mentor, s’attendrissait et ne pouvait parler. Enfin il prononça à peine ces paroles : Ô sage vieillard envoyé par les dieux pour réparer toutes mes fautes ! J’avoue que je me serais irrité contre tout autre qui m’aurait parlé aussi librement que vous ; j’avoue qu’il n’y a que vous seul qui puissiez m’obliger à rechercher la paix. J’avais résolu de périr ou de vaincre tous mes ennemis ; mais il est juste de croire vos sages conseils plutôt que ma passion. Ô heureux Télémaque, qui ne pourrez jamais vous égarer comme moi, puisque vous avez un tel guide ! Mentor, vous êtes le maître ; toute la sagesse des dieux est en vous. Minerve même ne pourrait donner de plus salutaires conseils. Allez, promettez, concluez, donnez tout ce qui est à moi ; Idoménée approuvera tout ce que vous jugerez à propos de faire.

Pendant qu’ils raisonnaient ainsi, on entendit tout à coup un bruit confus de chariots, de chevaux hennissants, d’hommes qui poussaient des hurlements épouvantables, et de trompettes qui remplissaient l’air d’un son belliqueux. On s’écrie : Voilà les ennemis, qui ont fait un grand détour pour éviter les passages gardés ! les voilà