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La colombe au tableau formait une auréole.
La vierge avec amour soignant chaque détail,
Avait presque achevé son férique travail ;
Il ne lui restait plus à broder qu’une feuille
Des roses où le sang rédempteur se recueille ;
Mais, pour la terminer, le fil vert et soyeux
A manqué tout à coup à ses doigts gracieux ;
La bobine d’émail de soie est dépouillée,
Il ne lui reste pas une seule aiguillée.
Comment faire ? … Il est tard ; le village est lointain.
Son ouvrage à l’église est attendu demain.
Demain, jour de Noël, elle a fait la promesse
De l’offrir à l’autel à l’heure de la messe ;
Et voilà qu’arrivée à la dernière fleur,
La soie est épuisée… Au coffret de sa sœur
Elle n’a pu trouver la couleur nécessaire
Pour achever la feuille. „Ô mon Dieu ! comment faire ?“
Et la naïve enfant a des pleurs dans les yeux.
„Pourquoi te lamenter, agir vaudrait bien mieux,
Dit alors Henriette ; allons dans les mansardes
Chercher dans le bahut rempli de vieilles hardes :
Il renfermait aussi de la soie à broder.
Allons, prends ce flambeau, montons sans plus tarder !“
Et les deux jeunes sœurs s’élancent, et joyeuses,