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MME AMABLE TASTU.

DÉCOURAGEMENT.


Ils me l’ont dit : parfois, d’un mot qui touche,
J’ai réveillé le sourire ou les pleurs,
Quelques doux airs ont erré sur ma bouche,
Sous mes pinceaux quelques fraîches couleurs.

Ils me l’ont dit ! connaissent-ils mon âme,
Pour lui vouer sympathie ou dédain ?
Non, je le sens, la louange ou le blâme
Tombe au hazard sur un fantôme vain.

Ah ! si mes chants ont brigué leur estime,
C’est que la mienne a passé mes efforts ;
Car mon talent n’est qu’une lutte intime
D’ardens pensers et de frêles accords.

Bruits caressans de la foule empressée,
Oh ! que mon cœur vous compterait pour rien,
Si je pouvais, seule avec ma pensée,
Me dire un jour : Ce que j’ai fait est bien !