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aux règles de l’art dramatique que celles de son concurrent, quoiqu’il les viole aussi dans les points essentiels. L’ingratitude des enfans de Sophocle est fameuse. Ennuyés de le voir vivre, et impatiens de s’emparer de son héritage, ils le déférèrent aux magistrats comme incapable de pouvoir régir ses biens. Quelle défense oppose-t-il à ses enfans dénaturés ? Il montre aux juges son Œdipe, tragédie qu’il venait d’achever, et ses enfans perdent à l’instant leur procès et leur honneur. Dans le sein du paganisme, Sophocle avait des idées justes sur l’unité de Dieu. Athénagore et Eusèbe en rapportent les vers suivans, qui sont une réfutation énergique du polythéisme :

Impietas templis tollet et urbe Deum :
Unus profecto, unus eut tandem Deus,
Marisque fluctos, vimque terræ globum,
Plerique nostrum, mente sed capti, Deum
Simulacra nobis, cen mali solatium,
Cum saxea atque acerna consecravimus,
Sive aureas eburneasque imagines,
Saeris et istos colimus, bis festos dies
Agimus : pios hoc esse nos remur modo.

On dit qu’ayant remporté le prix aux jeux olympiques, malgré son grand âge, il en mourut de joie, l’an 405 avant J.-C. D’autres le font mourir en récitant des passages de son Antigone. Il avait été couronné vingt fois et avait composé un grand nombre de tragédies. L’auteur anonyme de sa vie lui en attribue cent treize, Suidas cent vingt-trois, et Samuel Petit soixante-six. Nous avons les titres et des fragmens d’environ cent deux, recueillis par Brunck dans sa belle édition. Il ne nous en reste que sept entières, Ajax, Électre, Œdipe, Antigone, Œdipe à Colonne, les Trachiniennes et Philoctète. Nous avons un grand nombre d’éditions des tragédies de Sophocle ; celle de Richard Brunck est une des plus estimées, Strasbourg, 1789, 4 vol. in-8o ou 2 vol. in-4o. Voyez, pour connaître les diverses éditions de Sophocle, celle que nous venons de citer. On peut aussi consulter l’histoire de la littérature grecque par M. Schœll. Dacier a donné en français Électre et Œdipe, avec des remarques, in-12, 1692. Le père Brumoy a traduit ou analysé les pièces de Sophocle dans son Théâtre des Grecs. Louis Dupuy, de l’académie des belles-lettres, en a traduit quatre, que le père Brumoy n’avait fait qu’analyser. Rochefort, de la même académie, et Laharpe, ont donné en vers français, le premier Électre et le second Philoctète. On fait assez de cas de la traduction française de Rochefort, 1788, 2 vol. La vie de Sophocle traitée par Lessing (en allemand) 1790, est un morceau de critique admirable ; malheureusement il est resté incomplet.

SOPHONIE, Sophonias, le 9e des petits prophètes, fils de Chusi, commença à prophétiser sous le règne de Josias, vers l’an 624 avant J.-C. Ses prophéties sont en hébreu, et contiennent trois chapitres. Il y exhorte les Juifs à la pénitence ; il prédit la ruine de Ninive, et, après avoir fait des menaces terribles à Jérusalem, il finit par des promesses consolantes sur le retour de la captivité, l’établissement d’une loi nouvelle, la vocation des gentils, et les progrès de l’Église de Jésus-Christ. Les prophéties de Sophonie sont écrites d’un style véhément et assez semblable à celui de Jérémie, dont il paraît n’être que l’abréviateur.

SOPHONISBE (A.), naquit à Crémone vers l’an 1550, et acquit un grand renom dans la peinture. Elle excellait surtout dans le genre du portrait, et on admirait dans tous ses ouvrages la grâce des figures et la beauté du coloris. Elle a laissé en outre des dessins très estimés : l’un d’entre eux fut célèbre, il représentait une femme riant en voyant pleurer un petit garçon pincé par une écrevisse. Philippe II l’appela à sa cour, lui accorda de riches appointemens, et fut si satisfait de ses talens et de sa bonne conduite, qu’il lui donna rang parmi les dames de la reine. Il existe à Madrid et à l’Escurial plusieurs tableaux de cette dame artiste : elle avait fait les portraits de la famille royale. Elle mourut à Madrid dans un âge assez avancé.

SOPHRONE (saint), célèbre évêque de Jérusalem en 634, natif de Damas en Syrie, fut l’un des plus illustres défenseurs de la foi catholique contre les monothélites. Immédiatement après sa promotion il assembla un concile, où il foudroya leur hérésie. De là il envoya sa lettre synodale au pape Honorius, et à Sergius, patriarche de Constantinople : cette lettre fut depuis approuvée par le sixième concile général. Il députa à Rome Étienne, évêque de Dore, et lui dit : « Allez vous présenter au siége apostolique où sont les fondemens de la sainte doctrine. Informez les saints personnages qui y sont de tout ce qui se passe ici, et ne cessez point de les prier jusqu’à ce qu’ils jugent cette nouvelle doctrine, et la con-