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À Travers l’Inde en Automobile

par le souffle d’insurrection qui embrase incessamment les tribus nomades des frontières. C’est un feu dormant que l’appel du « Mullah », prêtre fanatique, peut réveiller en appelant aux armes pour le Coran toutes les tribus entre Peshawer et l’Afghanistan proprement dit. Ces Kahns (chefs) rassemblent alors leurs hommes, leurs rifles, leurs chevaux volés en fusillant les sentinelles ; comme les Sarrazins de jadis, ils se ruent sur les forts avancés, ivres de bataille et persuadés d’une béatitude éternelle s’ils tombent dans la « Jehad », la guerre sainte.

Lorsque la fureur religieuse les saisit, il faut qu’ils tuent un chrétien, ils deviennent « ghazi » illuminés, la foi décuple leurs forces, étouffe leurs craintes et, aveuglément, ils immolent la première victime qui se présente. Récemment, un soldat de planton auprès d’un bungalow d’officiers, poignarda son maître pour s’être, durant la nuit, couché irrespectueusement les pieds tournés contre La Mecque. Aussi, notre timide Kodah frissonne lorsqu’un suspect vendeur de tapis ou de cuivres nous importune et que nous nous en débarrassons par des paroles dures ; il conseille la prudence. Le soir, il procède à une triple inspection de nos chambres, il clôt les portes avec soin et place la tête du lit faisant bien face à l’orient, à la ville aimée, dont le pèlerinage tente sa dévotion et répugne à son avarice. Il se plaît à raconter à ceux qu’il approche que, pour reconnaître ses bons services, nous allons le porter à La Mecque, peut-être même, en guise d’offrande, déposerons-nous Philippe entre les mains d’un Mullah.