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CHARLOT

I

On parle toujours de rendre la vue aux aveugles. C’est malaisé. Et pourquoi faire, s’ils préfèrent ne point voir ? Ils n’ont pas encore aperçu ce qui est sous leurs yeux depuis des siècles et des siècles, alors que les voyants s’avouent fatigués de le voir. Comment, alors, apercevraient-ils cette œuvre qui s’ébauche à peine et que si peu devinent, même parmi les voyants ! Car voici un art nouveau, qui est celui du mouvement, c’est-à-dire du principe même de toutes les choses qui sont. Et le moins conventionnel de tous. Un immense orchestre visuel dont les sculpteurs de bas-reliefs indiens et les peintres du drame des lignes et des masses en action, Michel-Ange, Tintoret, Rubens, Delacroix, ont été les précurseurs. Quelque chose comme la peinture bougeant et se renouvelant sans cesse dans une symphonie visible où le rythme de la danse et les échanges mystérieux du poème musical rôdent, se rencontrent quelquefois et fusionnent un jour. Et la mécanique asservie pour soumettre au regard