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joue sa partie, lui aussi, dans la grande symphonie plastique où Renoir et Cézanne tiennent, à notre époque par exemple, comme Rubens et Rembrandt à une autre, le plus illustre rôle, je le veux bien. Mais c’est seulement par voie indirecte que l’esprit qu’il crée dans les foules réagit dans chaque affirmation nouvelle apportée par un grand artiste qui en ignore à peu près toutes les manifestations. Je crois que si le risque est plus grand, pour l’historien moderne, de mettre en valeur Cézanne et Renoir dans son récit, sa tentative est aussi légitime, point de vue dit « scientifique », que, pour l’historien passé, l’usage d’accorder plus d’importance, avec une candeur bien naturelle, à Phidias qu’à Léocharès.

Au fond, nous avons été, depuis plus d’un siècle - depuis Winckelmann à peu près -, beaucoup trop enclins à établir une confusion grandissante entre l’histoire de l’art et l’archéologie. Autant vaudrait confondre la littérature et la grammaire. Autre chose est de décrire les monuments que l’homme a laissés sur sa route par leurs caractères extérieurs, de les mesurer, d’en définir les fonctions et le style, de les situer dans l’espace et le temps, autre chose de tenter de dire par quelles racines secrètes ces monuments viennent plonger au cœur des races, comment ils en résument les désirs les plus essentiels, comment ils constituent le témoignage sensible des souffrances, des besoins, des illusions et des mirages qui ont creusé dans la chair de l’unanimité des morts et des vivants le passage sanglant de la sensation à l’esprit. C’est ainsi qu’en voulant écrire une histoire qui ne fût pas un catalogue sec des œuvres plastiques de l’homme, mais un récit aussi passionné que possible de la rencontre de sa curiosité et de son éducation avec les formes qu’il croise, j’ai pu commettre - j’ai commis - des erreurs archéologiques. Bien que j’en sache de pires, et que je n’aie pas non plus manqué d’en commettre, je n’irai pas jusqu’à dire que je ne les regrette pas.

L’archéologie a été profondément utile. En cherchant, en trouvant les sources primitives, en établissant les parentés,