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les marbres des Acropoles. Alors il l’incorpore à la matière, il fait un temple où les marbres multicolores, unis ou veinés, alternent avec les granits, les porphyres, les basaltes. L’harmonie n’importe guère : la couleur ne passera plus.

III

Même transformation partout, en peinture, en sculpture. La copie, consciencieuse, est toujours infidèle. Elle est alourdie, empâtée, pénible, elle est morte. Le statuaire grec qui travaille à Rome a quelquefois de beaux réveils, mais il obéit à la mode, il est tantôt classique, tantôt décadent, tantôt archaïsant. Quant au statuaire romain, sa besogne est de fabriquer, pour le collectionneur, d’innombrables répliques des statues de la grande époque athénienne. C’est la seconde étape de cet académisme dont le monde moderne souffre encore. La première datait de ceux des élèves de Polyclète, de Myron, de Phidias, de Praxitèle qui savaient trop bien leur métier.

Rome s’encombre de statues. Il y a des morts et des vivants. Tous ceux qui ont occupé une fonction publique, haute ou basse, veulent en avoir, sous les yeux, le témoignage matériel et durable. Bien plus, chacun, s’il peut se la payer, tient à savoir d’avance l’effet que produira l’auge dans laquelle on l’étendra. Ce n’est pas seulement l’Imperator qui verra sa vie militaire illustrer le marbre des arches et des colonnes triomphales. Le centurion, le tribun ont bien aussi, dans leur existence publique, quelque haut fait à livrer à l’admiration de l’avenir. Les sculpteurs de sarcophages imaginent le bas-relief anecdotique. Le « genre » d’histoire, cette forme spéciale de dégénérescence artistique qui fit de tout temps si bon ménage avec l’académisme, est inventé. Il s’agit de trouver et de raconter, dans la vie du grand homme, le plus de faits héroïques possible. Sur cinq ou six mètres de marbre, on entasse les aventures, on presse les personnages, les enseignes,