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Cependant une étrange force, une vie mystérieuse en sourd. Ces sombres fresques ressemblent à des ombres qu’on arrêterait sur un mur. Un tout-puissant génie décoratif s’y révèle, un équilibre constamment poursuivi et comme stylisé par l’apparente symétrie des gestes rituels, du vol des oiseaux, des branches, des feuilles, des fleurs. Quelque chose comme une danse, saisie au vol dans son rythme le plus fuyant.

L’Étrurie, en faisant l’éducation de Rome, fut l’étape intermédiaire de la civilisation dans sa marche de l’est à l’ouest. Les annales matérielles de la République romaine nous renseignent peut-être mieux sur le génie des Étrusques que sur celui de ses fondateurs. La voûte, que les Pélasges ont apportée d’Asie et dont leur descendance égéenne a doté la Grèce primitive, est transmise à Rome par leur descendance italique. L’arc de triomphe romain n’est que la porte étrusque modifiée. Rome demande à des ingénieurs d’Étrurie sa Cloaca Maxima, et c’est l’intestin de la ville, le viscère organique autour duquel sa matérialité profonde s’installera pour croître peu à peu et projeter ses bras de pierre sur le monde ancien tout entier. L’Étrusque, dès le vie siècle, n’apporte pas seulement à Rome sa religion et sa science augurale, il creuse les égouts, bâtit les temples, dresse les premières statues, forge les armes par lesquelles Rome l’asservira. Il coule le bronze, et ses bronzes ont une âpre force, tout entière tendue vers l’expression la plus intransigeante, rugueuse et drue comme les chênes ramassés de l’Apennin. Le symbole de Rome, la rude louve du Capitole, est d’un vieux bronzier toscan.

II

Dès ses débuts, Rome est elle-même. Elle détourne à son profit les sources morales du vieux monde, comme elle détournait les eaux dans les montagnes pour les amener dans ses murs. Une fois la source captée, son avidité l’épuise, elle