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ruisseler sa flamme dans l’intelligence hellénique est là, bien. plus que dans la grande sculpture décorative du moment. La richesse verbale y paraît moins choquante que chez l’artiste de Pergame, car ce petit art coloré, ardent, primesautier, est fait pour être vu de près. Aucune emphase. Cela est gras, presque brutal, fait pour communiquer l’ardeur de ces belles femmes provocantes aux reins dodus, aux bras ronds, aux cheveux lourds, aux robes entraînantes, maquillées, parées, équivoques, toutes chargées de bijoux. On pense à la sculpture indoue qui remuera bientôt dans l’ombre des cavernes, aux idoles de Byzance autour de qui les gemmes étincellent, à l’agonie splendide, dans la pourpre vénitienne, du paganisme oriental. La conquête de l’Occident par la femme d’Asie est sur le point de s’achever.

II

Partout, entre le IVe et le IIe siècle, partout en Italie, en Sicile, sur les côtes de l’Asie Mineure, l’art populaire et familier fait reculer l’art officiel. Le coroplaste de Myrina, de Tanagra, le sculpteur alexandrin reste lui-même, tandis que le décorateur des monuments publics essaie de rattraper une âme sortie de lui, sortie du monde, et de reconcentrer par des moyens artificiels les éléments dissociés de la création artistique. A Alexandrie, le sculpteur de figurines n’était sans doute pas, comme à Myrina ou à Tanagra, un ouvrier, mais plutôt un de ces artistes mondains très brillants, très superficiels, très adroits qui foisonnent autour du riche. Toute expression sociale nouvelle, sans doute, appelle un art qui s’y adapte, et qui est beau par cela seul. Mais les sociétés ploutocratiques ne constituent qu’un moment de cette expression, le dernier, celui qui précède la chute. On a dit que le luxe appelait les arts. C’est vrai. Mais le luxe consume l’art, le profond sentiment créateur qui sort des peuples en plein effort comme l’enfant du ventre maternel et qui porte en lui leur