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philosophie, le romancier de la rhétorique. Moment unique dans l’histoire où l’Égypte apporte son mystère, la Grèce sa raison, l’Asie son dieu, et où, malgré l’Égypte, malgré la Grèce, malgré l’Asie, la synthèse du monde ancien qu’effectueront dans le domaine trop aristocratique de l’esprit, l’enthousiasme des prophètes et la subtilité des sophistes, passera sur la masse humaine sans rassasier ses besoins. Le monde est fatigué de penser, il retrempe son idéal désorienté dans son élément primitif qui est l’innocence populaire. Une mythologie nouvelle triomphera des philosophes qui en préparent l’éclosion.

Ce milieu social particulier ne permet pas de croire à un grand art alexandrin qui serait perdu. Ni la forte architecture, ni la grande sculpture ne reposent sur des systèmes,_ surtout quand ils s’interpénètrent et varient incessamment. La source de l’inspiration plastique était tarie dans le cerveau trop compliqué des hautes classes, elle n’était pas encore ouverte dans l’âme trop obscure des peuples. Là comme ailleurs, certainement, il y eut d’admirables retours, des élans spirituels droits comme une flamme mourante, les sursauts d’un profond amour. Certains bas-reliefs alexandrins, gréco-latins, hellénistiques, le fait n’importe guère, car le même esprit s’insinue partout, certains bas-reliefs sont saisissants par la verve et la grâce, la joie sensuelle conquise sur le pessimisme intellectuel, l’ardent abandon à l’ivresse de jouir par la connaissance et de connaître en jouissant. Les grappes sont mûres, les vendanges se font au son des flûtes et des crotales, on danse sur le raisin. Un très long hiver peut venir. La ronde tourne, les femmes échevelées secouent leurs seins nus, montrent leurs jambes, les panthères rampent dans l’ombre pour lécher le sang qui coulera. Mais cette époque, où souvent l’hiératisme égyptien vient tenter l’inspiration mourante du Grec, cultive avec une passion fâcheuse la sculpture « de genre », qui marque infailliblement, sur la poussière des siècles, la trace de la bassesse et de la vulgarité de l’esprit. On surprend les métiers d’exception dans leurs aventures pittoresques, on raconte des historiettes