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C’est pour cela que nous aimons les petites idoles peintes, les orantes étonnées et barbares de l’Acropole primitive. Elles sont au point de tension le plus haut de la pensée grecque, à l’instant décisif où le génie humain va choisir la route à prendre. Les guerres médiques arrivent. Athènes, à la tête des villes grecques, donne à l’histoire un de ses plus beaux spectacles. Elle va tremper sa force morale dans le sacrifice et la souffrance et utiliser le repos d’esprit que lui procurera la guerre à léguer à la génération suivante des réserves intellectuelles immenses, qui jaillissent en forêts de marbre, en tragédies, en odes triomphales. Ainsi, toujours, au cours de notre histoire, la grande floraison d’esprit suit le grand effort animal et les hommes d’action engendrent les hommes de pensée. Nous touchons à l’heure de l’exaltation la plus puissante de l’enthousiasme humain. Les énergiques et douces créatures de marbre qui peuplaient la citadelle venaient d’être achevées quand les Perses les mutilèrent, Eschyle combat à Marathon, Pindare fait trembler au vent de ses vers les rameaux de l’arbre sacré, Sophocle enfant se met nu pour chanter le Pian sur la plage de Salamine. Une telle virilité soulève les artistes qui vont travailler dans les ruines de l’Acropole, qu’au lieu de relever les statues renversées, ils ne les jugent bonnes qu’à soutenir le piédestal de celles qui dorment en eux.