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Intentionnellement nous ne dirons rien des innombrables médicaments ou drogues, ni des interventions chirurgicales, tendant à immobiliser le poumon, que l’on a préconisés. Certains médicaments ont donné de bons résultats, certaines interventions chirurgicales ont eu des conséquences heureuses. Mais, seul, un médecin qui connaît le tempérament du sujet et qui suit l’évolution de la maladie peut donner d’utiles indications, lorsqu’il s’agit de questions aussi délicates. Jusqu’à présent, aucun sérum, aucun vaccin ne s’est révélé capable de guérir la tuberculose nettement déclarée. Par contre, on conseille l’emploi du vaccin Calmette-Guérin, à titre préventif, chez les enfants nés de parents tuberculeux. Ce vaccin est une culture vivante d’un bacille bovin, dépouillé de toute propriété tuberculigène. Le nourrisson doit en ingérer trois doses dans les dix jours qui suivent sa naissance ; l’immunité contre la tuberculose dure, paraît-il, environ cinq ans. On peut renouveler la vaccination dès la fin de la troisième année et à l’expiration de la septième, puis de la quinzième année. L’avenir dira ce qu’il faut penser exactement de l’invention des docteurs Calmette et Guérin.

Peste, choléra, typhoïde, diphtérie ont engendré des épidémies redoutables, mais comme leurs apparitions, ainsi qu’en témoigne l’histoire, furent intermittentes et rares, elles n’ont pas fait autant de victimes que la tuberculose. Seuls, la syphilis et le cancer exercent des ravages comparables à ceux de la maladie que nous étudions. En France, où les pouvoirs publics ne firent rien pour enrayer ce fléau jusqu’à la guerre de 1914–1918, il se révèle particulièrement meurtrier. C’est à 150.000 que la Commission permanente de préservation contre la tuberculose a évalué le nombre des décès annuels qui, chez nous, lui seraient imputables ; et les plus optimistes n’abaissent pas ce chiffre au dessous de 100.000. Des statistiques sérieuses semblent démontrer que, certaines années, la moitié ou presque des individus décédés entre 20 et 40 ans sont morts de tuberculose. Ajoutons qu’il est très difficile d’arriver à des évaluations exactes, car un grand nombre de décès tuberculeux sont attribués à d’autres maladies ou à des causes mal précisées. Les villes sont plus éprouvées que les campagnes ; et, du moins jusqu’à ces dernières années, Paris avait le triste privilège de détenir le premier rang, aussi bien par rapport aux principales agglomérations françaises, que par rapport à toutes les grandes villes d’Europe et même, assurent certains, du monde entier. La situation serait-elle meilleure, depuis que la lutte contre la tuberculose est à l’ordre du jour, je le souhaite, mais je manque de documents bien établis me permettant de l’affirmer. Durant les années de guerre, plus de 100.000 soldats furent réformés pour tuberculose ; beaucoup d’autres furent atteints du même mal sans parvenir à le faire reconnaître par les commissions de réforme. Un accroissement de la mortalité tuberculeuse s’en suivit : elle devint si grande, même à la campagne, que nos ineffables politiciens acceptèrent de voir prendre des mesures hygiéniques, d’ailleurs bien insuffisantes.

En Belgique, aux Pays-Bas, en Angleterre, en Allemagne, etc., la lutte contre la tuberculose, entreprise bien avant 1914, avait donné des résultats très encourageants. Alors que le nombre des décès tuberculeux était de 10 p. 100 en France, il était seulement de 6,2 en Belgique, de 7,02 en Angleterre, de 8,3 en Allemagne, de 8,0 aux Pays-Bas. Mais, chez les peuples qui prirent une part active à la dernière guerre, la recrudescence du fléau devint très sensible. C’est à la misère engendrée par l’injustice de notre organisation sociale que la tuberculose doit, d’ailleurs, de rencontrer un terrain si favorable. Alcoolisme, taudis, privations alimentaires, manque d’air salubre, facilitent singulièrement sa propagation. Les statistiques prouvent que des liens

très étroits relient l’alcoolisme à la tuberculose : cette dernière sévit de préférence dans les contrées où l’on consomme beaucoup d’eau-de-vie ou chez ceux que leur profession conduit souvent au cabaret. Les logements obscurs et mal aérés ont aussi une influence néfaste ; dans certaines maisons particulièrement insalubres, la mortalité tuberculeuse s’élève à 5,54 ou même 12 p. 1.000, alors qu’elle est seulement de 1,34 pour 1.000 dans des habitations du même centre construites d’une manière conforme aux règles de l’hygiène. Cuisines, water-closets, chambres d’hôtel sont, en outre, des lieux où les bacilles de Koch abondent, dans certaines demeures pourtant confortables et propres. Parce qu’elles débilitent l’organisme, les privations alimentaires diminuent la résistance de l’individu contre les germes de la maladie ; chez les jeunes surtout, elles aboutissent à des résultats désastreux. Or combien de familles ouvrières, ne mangent pas à leur faim, même en temps normal, à plus forte raison lorsque le chômage sévit ! Quant au manque d’air salubre et d’espace, il se fait vivement sentir dans tous les centres surpeuplés. L’atmosphère confinée des usines, des salles de spectacle, des écoles, des bureaux, des cafés, etc…, favorise la contamination d’une façon extraordinaire. Dans bien des bourgs ruraux, l’habitation du paysan est, d’ailleurs, aussi malsaine que le taudis ouvrier des grandes agglomérations. Jamais le soleil ne pénètre dans maintes demeures villageoises ; l’air n’y circule pour ainsi dire pas ; et une malpropreté repoussante achève d’en faire des foyers d’infection. Les professions qui ne permettent pas le travail à l’air libre prédisposent, d’une façon générale, à la tuberculose. Si la proportion atteinte pour les maçons, par exemple, est de 35 p. 100, elle variera de 64 à 85 p. 100, lorsqu’il s’agira d’ouvriers sédentaires vivant dans une atmosphère poussiéreuse. La mortalité tuberculeuse est particulièrement forte dans les prisons, dans les asiles d’aliénés, dans certaines administrations, surtout dans l’enseignement.

De toutes ces remarques il résulte que les ravages du bacille de Koch sont imputables à la société autant qu’à la nature. La rapacité des capitalistes s’est unie à l’orgueilleuse incompétence des gouvernants pour faire oublier les plus élémentaires règles de l’hygiène à nos contemporains. Par son aspect social, le problème de la tuberculose peut intéresser même ceux qui n’ont qu’un goût très limité pour les recherches médicales. — L. Barbedette.


TUMEURS n. f. (du latin tumor). D’après Brault, les tumeurs sont des néoformations irrégulières assez souvent désordonnées, mais qui rappellent toujours, par l’agencement et le groupement de leurs cellules, les organes et les tissus d’où elles dérivent. Il ne faut donc pas comprendre dans ce groupe les lésions parasitaires, tuberculeuses ou syphilitiques.

On divise les tumeurs : en tumeurs bénignes qui ne récidivent pas après l’ablation, et en tumeurs malignes qui récidivent après l’opération et tuent sûrement l’individu qui en est atteint.

Parmi les tumeurs bénignes, nous citerons : les fibromes, constitués par du tissu conjonctif fibreux, les lipomes, formés par du tissu graisseux, les chondromes, formés par du tissu cartilagineux, les angiomes, formés par des vaisseaux sanguins dilatés, les lymphadénomes, formés par du tissu réticulé lymphoïde, par exemple : le tissu des ganglions lymphatiques. Ces lymphadénomes peuvent se généraliser dans tous les organes, à la façon des cancers. Citons encore les tumeurs composées qui sont formées par plusieurs tissus distincts : ce sont les kystes, qui proviennent soit de la fonte d’un tissu, soit de la distension d’une cavité préexistante, les papillomes, dus à la prolifération exagérée du tissu conjonctif et épithélial de la peau et des muqueuses,