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que l’action n’est jamais assez révolutionnaire, mais qui serait, par contre, fortement embarrassé si on l’obligeait — ce qui serait prudent et salutaire — à prouver l’origine de ses « moyens » d’existence !… — A. Blicq.


SYLLABUS (LE). Syllabus, mot latin signifiant sommaire. En droit canonique, il est employé comme synonyme d’énumération succincte des points décidés dans un ou plusieurs actes de l’autorité ecclésiastique.

Le Syllabus qui fut publié, en décembre 1864, par le Pape Pie IX, à la suite de l’Encyclique Quanta Cura, est un recueil de quatre-vingts propositions latines. Résumé de toutes les allocutions consistoriales, lettres et encycliques prononcées et écrites par ce Pontife depuis 1846, il reprend, sans y ajouter le moindre commentaire, toutes les condamnations formulées contre les doctrines et les sociétés modernes. Le texte latin peut se traduire ainsi : « Résumé des principales erreurs de notre temps qui sont signalées dans les allocutions consistoriales, encycliques et autres lettres apostoliques de Notre Très Saint Père le Pape Pie IX. »

Ce document qui montre, dans une forme indirecte et négative, mais extrêmement claire, la doctrine politique et sociale de l’Église catholique, mériterait d’être reproduit en entier. Mais comme il ne sied point d’abuser de l’hospitalité qui nous est accordée, nous nous bornerons à donner, de ce document, les passages essentiels que nous ferons précéder d’un extrait de l’encyclique qui l’accompagnait.

a) Extrait de l’Encyclique Quanta Cura :

« … Il vous est parfaitement connu qu’aujourd’hui il ne manque pas d’hommes qui appliquent à la société civile l’impie et absurde principe du Naturalisme, comme ils l’appellent : ils osent enseigner que « la perfection des gouvernements et le progrès civil exigent absolument que la société humaine soit constituée et gouvernée sans plus tenir compte de la religion que si elle n’existait pas, ou du moins sans faire aucune différence entre la vraie religion et les fausses. » De plus, contrairement à la doctrine de l’Écriture, de l’Église et des saints Pères, ils ne craignent pas d’affirmer que « le meilleur gouvernement est celui où l’on ne reconnaît pas au pouvoir l’obligation de réprimer, par la sanction des peines, les violateurs de la religion catholique, si ce n’est lorsque la tranquillité publique le demande ». En conséquence de cette idée absolument fausse du gouvernement social, ils n’hésitent pas à favoriser cette opinion erronée, on ne peut plus fatale à l’Église catholique et au salut des âmes, et que notre prédécesseur d’heureuse mémoire, Grégoire XVI, appelait un délire, savoir que « la liberté de conscience et des cultes est un droit propre à chaque homme, qu’il doit être proclamé et assuré dans tout État bien constitué ; et que les citoyens ont droit à la pleine liberté de manifester hautement et publiquement leurs opinions, quelles qu’elles soient, par la parole, par l’impression ou autrement, sans que l’autorité ecclésiastique ou civile puisse limiter ce droit. »

« Quand la religion est bannie de la société civile, quand la doctrine et l’autorité de la révélation divine sont rejetées, la vraie justice ou plutôt la vraie notion de la justice et du droit humain s’obscurcit, se perd, et la force matérielle prend la place de la justice et du vrai droit. Qui ne voit, qui ne sent très bien qu’une société soustraite aux lois de la religion et de la vraie justice ne peut avoir d’autre but que d’amasser, d’accumuler des richesses et, dans tous ses actes, d’autre loi que l’indomptable désir de satisfaire ses passions et de se procurer des jouissances ? Voilà pourquoi les hommes de ce caractère poursuivent d’une haine cruelle les ordres religieux, sans avoir égard aux immenses services rendus par eux à la religion, à la société et aux lettres. Non contents de bannir la religion de la société,

ils veulent l’exclure de la famille. Enseignant et professant la funeste erreur du Communisme et du Socialisme, ils affirment que « la société domestique ou la famille emprunte toute sa raison d’être du droit purement civil et, en conséquence, que de la loi civile découlent et dépendent tous les droits des parents sur les enfants, même le droit d’instruction et d’éducation ». Tous ceux qui ont entrepris de bouleverser l’ordre religieux et l’ordre social, et d’anéantir toutes les lois divines et humaines, ont toujours fait conspirer leurs conseils coupables, leur activité et leurs efforts à tromper et à dépraver surtout la jeunesse. Voilà pourquoi le clergé régulier et séculier, malgré les plus indubitables et les plus illustres témoignages rendus par l’histoire à ses immenses services est, de leur part, l’objet d’atroces et incessantes persécutions, et pourquoi ils disent que « le clergé étant ennemi du véritable et utile progrès dans la science et la civilisation, il faut lui ôter l’instruction et l’éducation de la jeunesse… »

b) Syllabus. Des principales erreurs de notre temps, signalées dans les allocutions consistoriales, encycliques et autres lettres apostoliques de Notre Très Saint Père le Pape Pie IX.

I. — Panthéisme, naturalisme et rationalisme. — On doit nier toute action de Dieu sur les hommes et sur le monde. — Toutes les vérités de la religion découlent de la force native de la raison humaine ; d’où il suit que la raison est la règle souveraine d’après laquelle l’homme peut et doit acquérir la connaissance de toutes les vérités de toute espèce. — La foi du Christ est en opposition avec la raison humaine, et la révélation divine non seulement ne sert de rien, mais elle nuit à la perfection de l’homme. — L’Église non seulement ne doit, dans aucun cas, sévir contre la philosophie, mais elle doit tolérer les erreurs de la philosophie et lui abandonner le soin de se corriger elle-même.

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III. — Indifférentisme, latitudinarisme. — Le protestantisme n’est pas autre chose qu’une forme diverse de la même vraie religion chrétienne, forme dans laquelle on peut être agréable à Dieu, aussi bien que dans l’Église catholique.

IV. — Socialisme, communisme, sociétés secrètes, sociétés bibliques, sociétés clérico-libérales. — Disons, pour nous résumer, que ces sortes de pestes sont fréquemment frappées de sentences formulées dans les termes les plus graves, par exemple dans l’Encyclique Qui pluribus du 9 novembre 1846, dans l’allocution Quibus quantisque, du 20 avril 1849, dans l’Encyclique Quanto conficiamur moerore, du 17 août 1863.

V. — Erreurs relatives à l’Église et à ses droits. — L’Église n’est pas une vraie et parfaite société pleinement libre ; elle ne jouit pas de ses droits propres et constants que lui a conférés son divin Fondateur ; mais il appartient au pouvoir civil de définir quels sont les droits de l’Église et les limites dans lesquelles elle peut les exercer. — L’Église n’a pas le pouvoir de définir dogmatiquement que la religion de l’Église catholique est uniquement la vraie religion. — L’Église n’a pas le droit d’employer la force ; elle n’a aucun pouvoir temporel direct ou indirect. — L’Église n’a pas le droit naturel et légitime d’acquérir et de posséder.

VI. — Erreurs relatives à la Société civile, considérée soit en elle-même, soit dans ses rapports avec l’Église. — La doctrine de l’Église catholique est opposée au bien et aux intérêts de la société humaine. — En cas de conflit légal entre les deux pouvoirs, le droit civil prévaut. — L’Église doit être séparée de l’État, et l’État séparé de l’Église.

VII. — Erreurs concernant la moralité naturelle et chrétienne. — Les lois de la morale n’ont pas besoin